Loi travail : succès de la mobilisation dans tout le pays
Il y avait beaucoup de monde dans quelques 250 cortèges qui ont manifesté ce jour pour demander le retrait du projet de loi travail. Davantage encore que le 9 mars. Sur cette tendance, les organisations syndicales organisatrices et la police sont d’accord, même si leurs chiffres présentent toujours des écarts importants. La CGT et F0 évaluent à 1,2 million de personnes les manifestants dans toute la France, « avec plusieurs milliers d’arrêts de travail » dans les transports (SNCF, Air France…), à la Tour Eiffel, à l’Opéra de Paris, chez EDF, dans la fonction publique, la presse… Le 9 mars, les mêmes avaient estimé entre 400.000 à 500.000 le nombre de manifestants. Côté police, le compteur est monté à 390.000 contre 224.000 il y a trois semaines. Même le nombre de lycées bloqués totalement ou partiellement était en hausse : 250 selon les organisations lycéennes, 176 selon le ministère de l’Education.
De fait, quelle que soit la ville, les chiffres (de la police) témoignent du succès de cette journée d’action : 20.000 à Toulouse, 5.500 à Saint-Nazaire, 6.000 à Rouen, 15.000 à Caen, 7.000 à Grenoble, 5.000 à Clermont-Ferrand, 6.000 à Avignon…
Toutefois, ce ne serait pas le cas à Paris, à en croire la préfecture de police. Selon elle, la manifestation parisienne aurait rassemblé entre 26.000 et 28.000 personnes ; entre 27.000 et 29.000 le 9 mars. L’objectif de cette sous-évaluation, que l’on imagine dictée depuis Matignon, vise à installer l’idée que la mobilisation marque le pas, voire recule. Il suffisait pourtant d’enfiler ses bottes et de se couvrir d’un bon vêtement de pluie pour constater que la foule des grandes protestations était au rendez-vous entre les places d’Italie et de la Nation, malgré un temps exécrable. Souvent dense, le cortège a rassemblé 160.000 personnes selon FO, contre 100.000 le 9 mars.
Le gouvernement aurait tort de minorer l’importance de cette mobilisation, ou de gonfler celle des échauffourées constatées en plusieurs villes (Marseille, Toulouse, Lyon, Nantes, Rennes, Rouen, Paris…) et parfois imputables aux forces de l’ordre. Certains députés socialistes, à l’instar de Karine Berger qui ne compte pas parmi les frondeurs, l’invitent _« à prendre très au sérieux » les oppositions à sa loi, estimant qu’elles « témoignent d’un vrai malaise social ». Ce n’est pas la tendance naturelle de Manuel Valls. Au Sénat, lors des questions au gouvernement, le Premier ministre a dit « assumer ses différences » avec la CGT et FO au Sénat:
Nous avons souhaité privilégier, comme des organisations syndicales qui ne manifestent pas aujourd’hui, qu’on appelle réformistes, que la négociation soit d’abord dans l’entreprise et bien sûr dans les branches.
De son côté, la CGT estime « inutile » pour le gouvernement de « s’entêter plusieurs semaines comme pour la constitutionnalisation de la déchéance de nationalité et les mesures d’état d’urgence ». Dans un communiqué elle annonce que « l’ensemble des organisations syndicales à l’initiative de ce 31 mars » dont FO, Solidaires, FSU, Unef, FIDL, UNL, vont « proposer de poursuivre et amplifier l’action, les grèves, les manifestations, notamment le 5 avril en direction des parlementaires, le samedi 9 avril et après, jusqu’au retrait de ce projet de loi et pour l’obtention de nouveaux droits sociaux ». Cette dernière date doit permettre aux salariés opposés à la loi, et qui n’ont pu faire grève un jour de semaine, de participer au mouvement. Le bras de fer commence.
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