La CGT-police critique la gestion du maintien de l’ordre
Solidaire du mouvement social, la fédération cégétiste accuse les autorités policières d’avoir « laissé le champ libre aux casseurs » lors de la manifestation parisienne du 9 avril.
La CGT-police livre, dans un document fondé sur le vécu de «collègues de terrain», une version inédite des heurts très médiatisés qui se sont produits lors de la manifestation parisienne du 9 avril. À l’heure où de nombreux manifestants s’insurgent contre les violences policières, attestées à plusieurs occasions et en plusieurs villes depuis le début du mouvement d’opposition à la loi travail, ce témoignage apporte un éclairage utile, celui de l’autre côté de la barricade. Quand la CGT police exprime sa colère contre sa hiérarchie, ce n’est nullement pour dénigrer le mouvement social, mais pour contester une gestion du maintien de l’ordre qui vise au contraire à lui nuire.
Au fil de ces quatre pages, le syndicat dénonce un commandement «qui a laissé partir la manif de République malgré la présence de groupuscules violents anarchistes cagoulés», rappelant que des policiers avaient été blessés. À l’occasion de cette manifestation, le Mili (Mouvement Inter Luttes Indépendant) avait en effet publié un appel à «la jeunesse», l’invitant à prendre la tête du cortège et à ne pas se placer «en position défensive». L’organisation, qui a participé au «black block» du 9 avril, dénonçait notamment la répression policière : «Combien de personnes blessées depuis le retour du mouvement social? Combien de personnes arrêtées? Suffisamment pour ne pas pouvoir rester chez soi samedi 9 avril.»
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Le communiqué de la CGT-Police s’interroge sur les moyens mis à la disposition des agents. «Où sont les moyens de la DOSTL? Tels que des barres ponts et les lanceurs d’eau, qui auraient pu éviter aux malheureux collègues des compagnies d’intervention de se faire bombarder pendant plus d’une heure», écrit le syndicat, brandissant l’article XII de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, qui rappelle que «la garantie des droits nécessite une force publique (…) instituée pour l’avantage de tous».
Décrédibiliser les manifestations
Sarcastique, la fédération cégétiste remercie donc «la haute hiérarchie, bien au chaud dans les bureaux, de se soucier du sort des fonctionnaires de police sur le terrain», et d’avoir préférer «la défense d’intérêts particuliers au détriment de l’avantage de tous»:
Les policiers n’ont pas été autorisés (et on ne leur a pas donné les moyens) à intervenir pour protéger les manifestants pacifiques, les commerçants, les collègues, des biens, un commissariat… Par contre, pour protéger le domicile du premier ministre, là, tout a été fait.
Le syndicat estime que l’absence de consignes cohérentes vise à décrédibiliser les manifestations contre la loi El Khomri et le mouvement «Nuit debout», et facilite «les cas de violences policières». Selon eux, «la tactique semble claire « diviser pour mieux régner » et éviter le débat de fond sur les choix de société, en mettant en avant des « faits divers »».
Solidaire du mouvement, la CGT-Police rappelle que, comme n’importe quel salarié, elle aussi a des revendications sociales. Certaines sont, cela dit, plus spécifiques à l’institution. Parmi elles, la CGT demande à «retrouver un sens humain à notre métier, à savoir protéger la population et non remplir des statistiques, qui ne traduisent que les besoins de communication politique du moment», et réclame aussi «la fin des sanctions disciplinaires arbitraires».
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