Loi travail : La répression policière s’accentue
Les violences s’exercent contre des manifestants qui débordent largement ceux désignés comme des « casseurs identifiés ».
dans l’hebdo N° 1406 Acheter ce numéro
La vidéo a fait flamber les réseaux sociaux tout le week-end. On y voit, en marge d’une manifestation contre la loi travail présentée comme se déroulant à Toulouse le 26 mai, une jeune femme se faire saisir à la gorge par un policier et projeter contre une rambarde avant de tomber lourdement. Une enquête administrative aurait été ouverte.
Le même jour, à Paris, cours de Vincennes, Romain D., 28 ans, a été grièvement blessé à la tête par une grenade de désencerclement lancée par un policier. Le 31 mai, il était encore plongé dans un coma artificiel à la Pitié-Salpêtrière. Sa famille a été reçue par le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve. Le Défenseur des droits, Jacques Toubon, a lancé une enquête, et deux autres ont été confiées à l’IGPN, la police des polices. La répression policière s’accentue contre des manifestants qui débordent largement ceux désignés comme des « casseurs identifiés ». « Les manifestants qui restent sagement dans les rangs, pas de problème, mais ceux qui se rapprochent des zones de tension et vont au contact… », a confié un CRS à Politis.
La blessure de Romain D. n’est pas sans rappeler le drame de Sivens. La mort de Rémi Fraisse a été « un moment révélateur », explique aux Inrocks Pierre Douillard-Lefevre, auteur de L’Arme à l’œil (éd. BDL), lui-même blessé par un tir de police. « Non seulement il n’y a pas de remise en cause de l’arsenal policier, mais c’est au contraire l’occasion d’un renforcement historique et d’une légitimation de la violence d’État contre les contestataires par le gouvernement socialiste. »
À cela près que la répression lors des manifestations est désormais régulièrement filmée et diffusée sur Internet. La vidéo « permet effectivement de rendre visible, compréhensible au plus grand nombre, la violence d’État, de montrer qu’il n’y a pas de “bavures”, que ces violences font système », commente Pierre Douillard-Lefevre.
« Il n’y a aucune consigne de retenue, aucune consigne de ne pas interpeller… », avait assuré Manuel Valls le 19 mai en réponse aux accusations de laxisme du gouvernement face aux « casseurs ». Sauf que c’est bien l’absence de consignes, ou plutôt la délivrance de « consignes molles », qui met en difficulté les policiers sur le terrain. Entre ceux qui ont peur et la droitisation des autres, les agressions s’accumulent. Certains espèrent qu’elles dissuaderont de descendre dans la rue. D’autres redoutent que la violence n’augmente encore. De tous côtés.