Mobilisation pour empêcher l’expulsion d’un réfugié politique guinéen
Opposant politique dans son pays, étudiant en France sans-papier, Abdoulaye risque l’expulsion. Pour empêcher son départ des étudiants et collectifs appellent à un grand rassemblement samedi matin, devant le Tribunal administratif de Paris.
Arrêté le 13 septembre sans autres papiers que sa carte d’étudiant, Abdoulaye est désormais sous le joug d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF). Samedi 17 septembre, l’étudiant est convoqué à partir 8h30 au tribunal administratif de Paris. Un rendez-vous qui risque de ne pas bien se terminer pour Abdoulaye, dont le « dossier est très maigre », s’attriste Estelle, membre du Réseau universitaire sans frontière (RUSF) :
Mal conseillé, il n’a pas déposé de dossier pour réclamer l’asile politique. Il s’est rendu plusieurs fois à la préfecture de Créteil qui lui disait toujours de repasser un autre jour.
Venu de Guinée, Abdoulaye est diplômé d’une licence en sociologie. À 25 ans, il est aussi un opposant politique contre le parti au pouvoir dans son pays. Arrivé en France en avril 2016, le jeune homme a décidé de poursuivre ses études et s’est inscrit cette année en licence d’administration économique et sociale (AES) à l’Université Sorbonne-Panthéon de Paris.
Mais depuis mercredi, le jeune homme est détenu au Centre de rétention administratif (CRA) de Joinville après un contrôle d’identité à la Gare de Lyon. Estelle, doctorante à l’Université Paris-Diderot, appelle à une grande mobilisation pour soutenir ce jeune étudiant « qui risque gros » s’il devait être expulsé dans les prochains jours. « Tout ce qu’Abdoulaye me dit, c’est « faîtes ce que vous pouvez, ma vie est en jeu »… »
Militant de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), Abdoulaye est en effet membre du principal parti d’opposition. L’étudiant est notamment l’un des organisateurs de la grande marche pacifiste du 4 avril 2013. Resté très impliqué dans la vie politique de son pays, l’étudiant n’a jamais officiellement été condamné. « Les manifestations sont légales en Guinée, explique Estelle, mais il a reçu des menaces de mort à plusieurs reprises et des soutiens du parti au pouvoir se sont rendus chez lui. Heureusement, lui n’y était pas. » Rapidement exfiltré de son pays après ce jour, Abdoulaye s’est d’abord rendu à Bamako, puis à Rabah. Du Maroc, il s’est embarqué sur un bateau de fortune, en direction de l’Espagne, d’où il rejoint la France, pensant y être en sécurité.
En début de semaine, les étudiants de Paris 1 ont donc appris « avec stupéfaction» l’arrestation « de leur camarade ». Dans un communiqué, Ambre Froment, Mickaël Musto et les autres « indignés » de l’université dénoncent une arrestation inconsciente et risquée pour la vie d’Abdoulaye :
Cette arrestation pose plusieurs problèmes. Un problème humain d’abord. Alors que le gouvernement parle de paix et de fraternité, on constate qu’il s’attaque aux personnes les plus précaires. Un problème politique aussi. En effet, lui Président avait promu un pacte de « dignité » pour les migrants. Pourtant, le nombre d’expulsion ne cesse d’augmenter depuis 2012. À quoi peut servir une telle politique ?
Contacté par RUSF, la présidence de l’université de Paris 1 n’a pas souhaité apporter son soutien au jeune étudiant. Celle-ci estime « ne pas le connaître suffisamment », s’indigne Estelle. Déçue, parce qu’une lettre du Président aurait pu apporter beaucoup au dossier d’Abdoulaye, la jeune doctorante décrit un climat délétère qui ne se prête pas aux élans de solidarité. D’après elle, le milieu universitaire, « qui auparavant soutenait nos demandes de régularisation et nos démarches », devient méfiant. « Il est devenu très compliqué d’obtenir un geste de leur part », assure-t-elle, prenant exemple sur la discussion que celle-ci vient d’achever avec la présidence de l’Université
Le seul espoir encore espérée par la militante de RUSF ? Le vice de procédure. Mais en attendant, si la décision d’expulser Abdoulaye devait être prise, le nombre de jours qu’il reste au jeune homme en France devrait être connu dimanche.
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