Une centrale nucléaire vendue aux enchères
C’est l’histoire vraie d’une centrale nucléaire…
La construction du premier réacteur et son bâtiment de service, a commencé dans l’enthousiasme, sous les applaudissements du public et de la presse régionale, au cours de l’année 1974. L’édification du second réacteur commença quelques années plus tard, toujours dans l’euphorie et les promesses de « développer la région ». Et puis les travaux ont ralenti imperceptiblement tandis que se poursuivaient les incantations sur le développement régional. Avant d’être progressivement arrêtés vers la fin des années 80, au moment où le réacteur numéro un était terminé à 95% et le deuxième réacteur à 50%.
Ensuite, on l’oublia tandis que des oiseaux de proie s’installaient sur les bâtiments, les busards cendrés ayant choisi de se réserver la colonisation de la tour de réfrigération numéro deux. Les travaux de la centrale abandonnée devaient reprendre en 2011. Il ne s’est rien passé. Depuis quelques jours, l’ensemble est à vendre par adjudication avec un terrain. Sans être vraiment nettoyé…
Nous ne sommes pas en France ni encore moins à Fessenheim, mais à Hollywood. Non pas la capitale du cinéma mais une petite ville de 2 000 habitants dans l’État d’Alabama. La centrale Bellefonte, puisque c’est son nom officiel, sera mise aux enchères dans quelques jours pour un prix de base un peu supérieur à 36 millions de dollars (32 070 583 €).
Un prix d’ami pour lequel il y aura peu d’enchérisseurs tant les centrales nucléaires ne passionnent plus guère les investisseurs et l’industrie énergétique du pays. Aucun n’a voulu reprendre et terminer une construction décidée et financée par la Tennessee Valley Authority (TVA), une entreprise notamment consacrée à la production électrique et créée en 1933 par le président américain Franklin Delano Roosevelt. Et malgré une belle campagne de relations publiques, les candidats à l’achat ne se bousculent pas.
Comme les autres entreprises destinés à produire de l’électricité, la TVA renonce progressivement au nucléaire. Car, non seulement les investissements sont devenus trop lourds pour le privé, mais en plus, la plupart des sociétés d’assurance refusent de couvrir les risques. Qu’il s’agisse de ceux pouvant survenir dans les bâtiments comme surtout de ceux courus par les populations en cas d’accident entraînant des dégagements de radioactivité. À la moindre fuite, c’est la ruine…
Les centaines de techniciens et d’ouvriers qui avaient fait rêver la région et entraîné un boom économique éphémère sont partis depuis longtemps. Sur place, il ne reste qu’une cinquantaine de personnes pour la maintenance. Mais aussi pour la surveillance, en raison des risques de pollution, comme l’a expliqué l’un des responsables de la Tennessee Valley Autority, Jim Chardos, aux journalistes chargés d’annoncer officiellement la vente prochaine grâce à une visite guidée.
En faisant l’article, il a précisé : « Il est désormais inutile de construire de grosses unités énergétiques destinées à durer. Surtout quand le marché de l’électricité joue sans cesse aux montagnes russes. Nous espérons donc rentrer dans une petite partie de nos frais. »
Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.
Faire Un Don