Jungle de Calais : démantèlement imminent
La réponse a traîné mais elle a fini par tomber : mardi 18 octobre, en début d’après-midi, le tribunal administratif de Lille a annoncé qu’il rejetait le référé déposé le 13 octobre contre le démantèlement de la jungle de Calais. 11 associations dont le Secours Catholique-Caritas, Emmaüs France et l’Auberge des migrants, avaient tenté de faire valoir juridiquement qu’un démantèlement rapide, sans diagnostic personnalisé préalable et sans garantie sur le parcours et l’accompagnement des 7 000 migrants sortant de la jungle, irait à l’encontre du respect de la dignité et des droits des migrants.
Avec des habitants du bidonville, ces associations espéraient notamment « obtenir que différentes mesures de protection soient prises, sans délai, par l’autorité préfectorale au bénéfice des occupants de la partie nord du bidonville dit de “la Lande” de Calais ».
Peine perdue : la démarche du gouvernement mise en œuvre à Calais est « validée », se félicitent Bernard Cazeneuve et Emmanuelle Cosse dans un communiqué du 18 octobre. Motif avancé par le tribunal : « Le principe même de démantèlement du site de la Lande [nom officiel de la « jungle », NDLR] de Calais ne méconnait pas le principe de prohibition des traitements inhumains et dégradants ».
« Nous sommes éminemment déçus !, commente Thierry Kuhn, président d’Emmaüs France. Avec les autres associations, nous réfléchissons à la meilleure manière de poursuivre notre action. Nous envisageons de faire appel… »
Le président d’Emmaüs France, dont l’organisation via la structure Emmaüs Solidarité va assurer la gestion du camp de réfugiés qui doit ouvrir à Paris fin octobre, n’est au courant d’aucun calendrier : ni du jour d’ouverture du camp à Paris, ni de la date exacte du démantèlement de la jungle, ni de son déroulement et des suites de l’opération. « Ce ne sont pas des conditions pour être en confiance, pince-t-il. Personne n’est pour le statu quo concernant le bidonville alors que l’hiver arrive. Mais nous attendons des garanties sur le sort réservé aux migrants. »
Le 24 octobre à Calais, ceux-ci pourraient en effet avoir à choisir entre aller en Centre d’accueil et d’orientation (CAO) ou directement en Centre de rétention. « Pire !, s’inquiète Thierry Kuhn, ils pourraient être embarqués en bus vers des CAO où il sera décidé s’ils peuvent rester ou s’ils sont enfermés en centre de rétention. » Démantèlement rapide, exercice des droits éclair, et inadapté…
Sur les places d’hébergement en France, l’heure est au jeu des chaises musicales : on tenterait même de transvaser une partie des migrants hébergés en Centre d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA) en centre de rétention (CRA) pour libérer des places en CADA. « On déplace le problème !, s’insurge Thierry Kuhn. Non seulement les CADA sont également menacés, mais, en plus, on part du principe que tous les migrants présents en France veulent demander l’asile en France… »
Qu’adviendra-t-il de ceux qui se rendront à Calais coûte que coûte ? Un accueil du type CAO pourrait finalement être maintenu à l’emplacement de la jungle. C’est la seule concession qu’aurait faite le gouvernement.
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