Films de genre

À l’occasion du 8 mars, seules Arte et France 5
font la part belle aux femmes.

Jean-Claude Renard  • 1 mars 2007 abonné·es

En termes d’images, la journée des femmes est aussi l’un des marronniers de l’année. Quoique. Sur le service public, France 2 a choisi Nicolas Sarkozy (certes, face à Arlette Chabot et sans Duhamel) dans sa case politique « À vous de juger ». À suivre par le dernier volet d’un documentaire consacré aux juges, puis un autre (diffusé à pas d’heure) sur Enron, ce qu’on peut appeler « le casse du siècle », remarquablement réalisé par Emmanuel Amara et Charles Noli. France 3, de son côté mise sur un James Bond contre Dr No , avant de clore sa soirée sur la série NYPD Blue .

Réellement, seules France 5 et Arte font la part belle aux femmes à l’occasion de cette journée. France 5 propose une programmation spéciale : le parcours d’une jeune Algérienne, Chahinaz : quels droits pour les femmes ? (le 4 mars à 21 h 40) ou encore un portrait d’Assia Djebar, surnommée la Sagan musulmane (le 6 mars à 21 h 40). Arte n’est pas en reste. Samedi 3 mars (à 22 h 35), Danser, tout simplement , se veut un coup de projecteur sur la chorégraphe Henrietta Horn, qui a pris les rênes du Folkwang Tanzstudio aux côtés de Pina Bausch. Le lundi 5 mars (à partir de 22 h 20), deux documentaires dressent un état des lieux d’une santé au féminin qui n’est prise en compte ni par les médecins ni par l’industrie pharmaceutique.

À vrai dire, France 5 et Arte déclinent à l’année la journée des femmes. Sans attendre le 8 mars. « Les Maternelles » occupent l’antenne de France 5 en semaine, tandis que sur Arte Églantine Eméyé anime le magazine « Chic » et Rebecca Manzoni « Metropolis ». Sur ces deux chaînes, on a vu récemment Madame la déléguée du procureur, les Jeunes filles du pénitencier de Tomsk ou encore un portrait d’Ann Boleyn par Lubitsch. Pour ce 8 mars, la chaîne franco-allemande ne déroge pas à la tendance. Et diffuse en seconde partie de soirée un documentaire d’Agnès Bert, Tu seras un homme ma fille , articulé autour d’un coin reculé des Balkans, au nord de l’Albanie, où la tradition autorise certaines femmes à vivre comme des hommes. Le documentaire est précédé d’une fiction, Cléo de 5 à 7 , d’Agnès Varda. Film d’une génération, film d’un mouvement, celui de la Nouvelle Vague. Emblématique à foison. Portrait de femme, réalisé par une femme. Passons sur le canevas. Deux heures de la vie d’une chanteuse, dont la gueule d’ange blond (forcément blond) bute sur de pleines bordées de fragilité. Deux heures en attendant les résultats d’un examen médical. Un temps réel, découpé en tranches horaires indiquées en sous-titre. Des haricots la vie.

C’est là une approche du personnage à fleuret moucheté. Un personnage griffé, égratigné. Caressé aussi par une caméra sensuelle collant au corps élastique de Corinne Marchand, rehaussé par une voix off qui vient, va, vogue, accoste au gré des rencontres, d’une errance parisienne, au fil d’une conscience qui s’ouvre au monde, trouve son identité. Ça flirte avec la maladie, assurément, en noir et blanc (au diapason d’une robe à pois), ou plutôt le sentiment de la maladie. Surtout, ça courtise le frais (force scènes sont tournées en extérieur), se gorge de répétitions, de chansons poussées par Michel Legrand, impromptues (ou qui en ont l’air). Avec des airs de faux, ou de défauts, ces fameux défauts dont parlait Truffaut. Cléo : une cuisine de marché, avec son phrasé, ses ponctuations, sa légèreté suspendue dans la gravité. Il était difficile de mieux marquer cette journée.

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