Au risque de l’immobilisme

Le conseil national du PS refuse de céder à la précipitation de Ségolène Royal, qui voulait un congrès de rénovation au plus vite et joue plus que jamais contre son parti. Reste à éviter un statu quo destructeur.

Michel Soudais  • 28 juin 2007 abonné·es

Le divorce entre Ségolène Royal et François Hollande n’est pas seulement civil. Il est aussi et avant tout politique quand l’ex-candidate du PS à l’élection présidentielle se prévaut des militants qui l’avaient désignée et des suffrages de 17 millions de Français pour contester les orientations, la stratégie et la direction du parti dont elle est issue. Un parti dont son ex-compagnon défend les traditions ­ le débat d’idées avant les choix de personnes ­ et les procédures de débat. En l’absence de Ségolène Royal, dont la décision de ne pas participer à ce premier rendez-vous post-électoral a été désavouée jusque dans les rangs de ses partisans, le conseil national du PS a approuvé à une écrasante majorité le calendrier de rénovation du parti proposé par François Hollande.

Illustration - Au risque de l’immobilisme


François Hollande au conseil national du PS. DE SAKUTIN/AFP

Ce processus s’ouvrira dès l’université d’été de La Rochelle, fin août, et s’achèvera par un congrès ordinaire, au lendemain des élections municipales de 2008. Avec trois objectifs majeurs : « redéfinir les orientations », « rénover les procédures et revoir l’organisation » et « tracer les nouvelles frontières de la gauche ». À partir de septembre, trois forums seront ouverts, sur « Le socialisme dans la mondialisation », « L’avenir de la solidarité » et « La citoyenneté dans la nation ». Une commission de la rénovation sera mise en place pour élaborer une révision des procédures et de l’organisation du parti. Enfin, des assises de la gauche seront lancées avec d’autres formations politiques et acteurs du mouvement social, pour coordonner l’opposition à la politique de la droite et préparer les échéances électorales.

Seule une poignée de rénovateurs a mené une fronde ouverte. « Les mêmes méthodes, les mêmes équipes, le même premier secrétaire ne peuvent produire que les mêmes effets » , a déclaré le député-maire d’Évry, Manuel Valls, votant contre la proposition Hollande. Les amis de la présidente de Poitou-Charentes se sont divisés : son ex-directeur de campagne, François Rebsamen, a voté les propositions du chef du parti, d’autres, comme Arnaud Montebourg et David Assouline, n’ont pas participé au scrutin.

Désavouée dans sa volonté de prendre rapidement les rênes du PS, critiquée pour ses appels du pied à François Bayrou, son jugement tardif sur deux mesures phares du projet socialiste « peu crédibles » ­ le Smic à 1 500 euros et la généralisation des 35 heures ­, et sa déclaration sur sa « probable » candidature à la présidentielle de 2012, Ségolène Royal est plus que jamais tentée de contourner son parti. Et de renouer avec une stratégie qui lui avait permis d’obtenir le vote d’investiture en jouant l’opinion publique contre le PS. C’est ainsi qu’elle a relancé l’activité de son association Désirs d’avenir, dès le soir du second tour, engageant « une nouvelle campagne d’adhésion » dans le but affiché d’ « approfondir la rénovation de la gauche » . L’autre volet de cette stratégie passe par une expression privilégiée dans les médias.

Absente samedi à la réunion du conseil national du PS, Ségolène Royal était en revanche très présente à la télévision dimanche, sur Canal + et sur TF 1. Mettant l’accent sur la légitimité des militants, dont elle avait souhaité à plusieurs reprises qu’ils soient « consultés » sur le processus de rénovation, elle a affirmé que le parti n’appartenait « pas à un groupe ou à une minorité de personnes dirigeantes » mais « à tous les militants » . Tandis que, sur Radio J, Julien Dray évoquait un « fossé entre une sorte de petit état-major et la réalité militante de terrain » . Critiquant l’organisation du PS en courants, une structuration responsable, selon elle, de l’absence de débats et de « clarification des choix politiques » , Ségolène Royal a aussi appelé le PS à avoir « le courage de remettre en cause certains dogmes et slogans » .

Pour éviter un congrès précipité, plus propice à une « révolution de palais » , suivant l’expression de Jean-Luc Mélenchon, les responsables socialistes se sont-ils rassemblés autour de François Hollande « pour que rien ne bouge » , comme le soutient Manuel Valls ? Le sénateur de l’Essonne convient lui-même que le résultat « peut paraître pas très glorieux » . Il y a cinq ans, dans une situation similaire, François Hollande avait déjà tergiversé. Le 29 juin 2002, devant le conseil national, le premier secrétaire du PS avait pareillement suggéré l’organisation de forums et d’états généraux avant toute mise en route d’un congrès. Peu s’en souviennent. Parmi « quatre raisons » responsables, selon lui, de la défaite de 2002, il citait « le défaut de projet clair et mobilisateur par rapport à la construction européenne » . À en juger par les déclarations contradictoires par lesquelles les socialistes ont accueilli le « traité simplifié » concocté au sommet européen, on ne peut pas dire qu’une clarification se soit opérée. Si le PS veut renouer avec le succès, il ne pourra cette fois s’en dispenser.

Politique
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