Cauchemar d’avenir

Une adaptation moderniste
d’un récit de Dostoïevski
par Victor Gauthier-Martin.

Gilles Costaz  • 28 juin 2007 abonné·es

Le récit de Dostoïevski le Rêve d’un homme ridicule fascine les hommes de théâtre. Siegrid Alnoy l’adaptait avec le comédien Carlo Brandt à la Colline, en début de saison. Un jeune metteur en scène, Victor Gauthier-Martin, dont on avait apprécié une vigoureuse vision du Timon d’Athènes de Shakepeare, transpose à son tour ce conte philosophique. L’auteur de l’Idiot imagine le songe d’un homme qui, voulant se donner la mort, tombe dans le sommeil et rejoint par la pensée une communauté humaine idéale : c’est l’harmonie entre les êtres et le bonheur sans nuages. Cet homme, qui appartient à une humanité bercée par ses utopies, contamine cette collectivité rêvées d’idées fausses ­ en gros, celles d’une société progressiste, car Dostoïevski est un réactionnaire persuadé qu’un retour à Dieu est un retour à l’innocence. À son réveil, le songeur ne veut plus mourir, mais faire partager sa conception d’une vie renouvelée.

Au départ, le spectacle mis en scène par Victor Gauthier-Martin est un projet d’acteur puisque l’interprète principal, Régis Royer ­ qu’on connaît notamment pour avoir été le Toulouse-Lautrec du film de Roger Planchon ­ a réalisé lui-même l’adaptation. Victor Gauthier-Martin s’en empare en metteur en scène doté d’une vison politique et utilisant des moyens non classiques. Un guitariste rock, Dayan Korolic, déchire de temps à temps le climat. Un écran au fond de la scène montre l’errance d’un personnage dans la nuit urbaine. On ne comprend pas nécessairement tout ce que le metteur en scène veut dire (« Le prêcheur de Dostoïevski est devenu hacker, choisit d’utiliser tous les canaux de la communication pour combattre un empire qui organise, prépense et digère tout ce que nous sommes » : citation un peu écourtée !).

Mais ce court moment a de l’énergie et un sens de l’insolite dans le regard critique. On apprécie surtout le jeu de Régis Royer, funambule à la noire gaîté.

Culture
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