La LCR fait sa révolution

Le « nouveau parti » que la LCR projette de construire « pourrait être un regroupement de personnalités anonymes » , a précisé Olivier Besancenot, lors de la 16e université d’été de la formation trotskiste, qui se déroulait du 25 au 28 août, à Port-Leucate (Pyrénées-Orientales). Si l’annonce de la création d’une nouvelle organisation « anticapitaliste » et « révolutionnaire », vouée à remplacer la LCR, a dans l’ensemble été bien accueillie, les modalités de sa création ont suscité de nombreuses questions lors des débats. Danièle, à l’instar d’autres jeunes militants, a pris la parole pour demander des clarifications. Et pour contester l’idée selon laquelle il n’y aurait plus de partenaires à gauche du PS, comme l’affirment les dirigeants de la Ligue. « Ce n’est pas réel, pas concret de s’adresser à des individus anonymes , a-t-il déclaré. Des partenaires existent. Si les collectifs antilibéraux ont échoué, il y a des acquis. Il faut dire qu’on s’adresse aux gens des collectifs. » Comme l’a martelé le porte-parole de la LCR lors son discours, Alain Krivine préfère parler de « reconstruction » et abandonner pour l’instant l’idée d’une recomposition. D’où la décision de ne plus solliciter les traditionnels partenaires de la gauche antilibérale : « Depuis trente ans, on a tout essayé sans succès avec la gauche radicale. Sans vouloir la négliger, il faut reconnaître qu’elle ne représente plus rien aujourd’hui. »

Pour les dirigeants de la LCR, cette crise de la gauche offre donc un contexte favorable à la création d’un nouveau parti. Il s’agit pour eux de battre tant qu’il est chaud le fer des bons résultats électoraux réalisés par le jeune facteur (4,08 % à la présidentielle). Mais aussi de capter durablement « cette très forte minorité de personnes qui veulent résister » , comme la qualifie Alain Krivine. Pour Anne Leclère, « l’objectif est de répondre à toute une population en demande. De nombreux jeunes issus des quartiers ont adhéré à la Ligue à l’issue de la campagne. De même que des salariés de Pizza Hut, de Maxilivres ou des femmes du groupe Accor qu’Olivier était allé rencontrer pendant leurs luttes. Un vrai changement qu’il faut accompagner est en train de s’opérer au sein de notre parti » . Ils seraient deux mille à avoir contacté la Ligue, ces derniers mois, pour adhérer. Afin de convaincre ces nouvelles recrues de rester au sein du parti, la direction a même prévu de reconsidérer le « rythme militant », très intense à la LCR. « On ne peut pas avoir la même exigence vis-à-vis d’une personne qui subit la précarité et des horaires de travail très soutenus que celle qu’on a avec un jeune étudiant, fils de prof, précise Pierre-François Grond. On ne veut plus d’un parti avec d’un côté des intellectuels qui dirigent et de l’autre des prolos qui collent les affiches. »

La Ligue doit faire sa « révolution culturelle » , selon les propres termes d’Olivier Besancenot, d’où cette rupture indispensable avec un certain héritage du passé. Une révolution qui, assure Alain Krivine, ira à terme jusqu’à un changement de direction : « Nous prévoyons d’introduire au sein de la direction de ce nouveau parti des personnes qui se sont illustrées au sein de luttes sociales pour que cette direction soit « à l’image des changements qu’elle a initiés. » » Christine Poupin insiste sur la volonté de la LCR « d’initier une dynamique collective pour lutter plus efficacement contre la politique de Nicolas Sarkozy. Notre objectif n’est pas juste de faire grossir les rangs de notre organisation » . La Ligue propose pour cela à toutes les forces de gauche, socialistes comprises, pour « rester unis dans les luttes » , de venir rejoindre ses troupes au sein de « comités de résistance ». Seule la minorité de Christian Picquet accueille avec circonspection l’idée de se passer de la gauche antilibérale. Pour ce dernier, « le problème se posera dès les prochaines municipales si l’on exclut toute possibilité de réaliser des alliances » . D’autres questions feront l’objet de débats à la fin de l’année, lors du prochain congrès de la LCR. Et notamment celle de la nature de ce nouveau parti. Comme le faisait remarquer au micro Jérémie, « les personnes que l’on côtoie dans les luttes sont plutôt des réformistes que des révolutionnaires… »