Implacable

« Moi, Pierre Rivière… », de René Allio, ressort sur les écrans. Un film d’une force singulière.

Christophe Kantcheff  • 25 octobre 2007 abonné·es

Trois semaines après la sortie de Retour en Normandie , riche documentaire de Nicolas Philibert, qui revenait trente ans après sur les lieux du tournage de Moi, Pierre Rivière, ayant égorgé ma mère, ma soeur et mon frère , le film de René Allio est à nouveau en salle. À cette occasion, on (re)découvre en particulier que les images de Moi, Pierre Rivière… utilisées par Nicolas Philibert ont été passées en noir et blanc, sans doute pour faciliter une identification immédiate et pour travailler sur l’écart entre les périodes, alors que le film est bien en couleur. Mais surtout, on est face à une oeuvre d’une rigueur implacable et d’une force tout à fait singulière.

D’abord parce que l’alliance entre les comédiens professionnels et les Normands recrutés pour jouer fonctionne parfaitement. Ceux qui interprètent les membres de la famille Rivière, notamment, dont certains sont très présents dans Retour en Normandie , réussissent à créer le climat de conflits et de violence qui règne au sein de celle-ci. Quant à Claude Hébert, dans le rôle de Pierre, il est totalement convaincant.

Ensuite, parce que René Allio est parvenu à mêler harmonieusement un certain naturalisme, ne reculant pas devant la crudité ou l’âpreté de plusieurs scènes, et la stylisation nécessaire requise par son parti pris de rester extrêmement fidèle aux documents, en particulier au stupéfiant témoignage écrit par Pierre Rivière à la suite de son arrestation.

Enfin, parce que Moi, Pierre Rivière… interroge une question, revenue au-devant de l’actualité ces derniers mois, qui, déjà, passionnait Michel Foucault, le philosophe ayant réuni les éléments de cette affaire dans un livre : la responsabilité pénale d’un malade mental ayant commis un crime. Moi, Pierre Rivière… ne prend pas parti. Le film laisse même la question du dérèglement psychique de Pierre en suspens. Il préfère montrer la complexité d’une telle situation, et, en empathie avec son personnage principal, mettre en relief l’intensité de sa sensibilité et de sa souffrance.

Culture
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