Avec les étudiants, contre l’autonomie des universités
Politis.fr a suivi les étudiants parisiens mobilisés hier contre la loi sur l’autonomie des universités, de la place de la Bastille jusqu’à la Gare du Nord, en passant par la Sorbonne. Récit.
Un an et demi après leur mobilisation contre le CPE, ils sont de retour. Les étudiants ont investi les rues de plusieurs villes de France, jeudi 8 novembre, pour demander l’abrogation de la loi sur l’autonomie des Universités. A Paris, place de la Bastille, ils sont quelques centaines, à 15h, à attendre en silence du soutien, quand arrive à grand bruit le cortège de l’université Paris VIII. On se lève des marches de l’Opéra pour investir la place et bloquer la voie à la circulation. On discute, on scande quelques slogans et on ironise sur les médias venus en surnombre. Un étudiant refuse catégoriquement d’être interviewé par un journaliste du Monde. « Allez plutôt voir l’Unef » , lui lance t-il, moqueur.
C’est que la mobilisation anti-CPE a laissé des traces. Les étudiants ne souhaitent plus voir leur discours édulcorés par les JT ni participer, à leur insu, à une révision à la baisse de leurs revendications. « La victoire du CPE » annoncée à grand renfort médiatique a laissé un goût amer et ils sont nombreux à ne plus vouloir se laisser berner. Gilles (un prénom d’emprunt) est un étudiant de Tolbiac qui a justement découvert la politique pendant les mobilisations de 2006. Il va aux AG, bloque sa fac et débat avec passion sur l’avenir des universités. Il refuse de voir des personnes non universitaires au Conseil d’administration : « Bouygues a déjà annoncé vouloir prendre des sièges en archéologie et bientôt ce sera Mac Do en bio ! » Gilles s’emporte contre la volonté gouvernementale de « casser le mouvement » et raconte que la fermeture de Tolbiac par son président Pierre-Yves Hénin, vendredi dernier, vient d’en haut. Le matin, les policiers étaient aux côtés des vigiles pour empêcher l’entrée aux étudiants. Selon les témoignages de plusieurs d’entre eux, s’ajouteraient à cet arsenal des vigiles privés, grassement payés par l’université, « alors qu’on nous rabâche qu’elle manque de moyen » , s’énerve Gilles. Une autre étudiante, de Paris VIII cette fois, explique que la mobilisation prend de l’ampleur et qu’avant de se rendre à Bastille ils s’étaient rendu dans des écoles pour informer sur la loi sur les libertés et responsabilités des universités (LRU). En AG, ils n’ont pas voté le blocage. Pour l’instant.
Les syndicats Sud et l’Unef sont présents, mais beaucoup d’étudiants ne sont pas affiliés. Ils sont nombreux à se mobiliser dans les AG, sans l’intermédiaire des syndicats. Ainsi, la Coordination nationale étudiante, composés des délégués de 21 universités a lancé le coup d ‘envoi des mobilisations, fin octobre, depuis Toulouse. Elle milite pour l’abrogation de la loi LRU et a appelé à manifester le 30 octobre, le 8 novembre et pour le 20 novembre. Ses revendications ne sont pas uniquement étudiantes. Elle refuse également le démantèlement des services publics, la privatisation de la sécurité sociale et les lois anti-immigrés. Le collectif étudiant contre l’autonomie des universités (CECAU), composé de la Fédération syndicale étudiante, de Sud étudiants, des Jeunesses communistes, de l’Union des étudiants communistes et la Jeunesse communiste révolutionnaire a annoncé soutenir « l’auto-organisation des étudiants » et soutient leurs moyens d’action. L’Unef, quant à elle, a raccroché le mouvement la veille et appelle à « amplifier le mouvement » .
Après quelques hésitations sur le trajet, la troupe se dirige vers Sully Morland. Boulevard Saint Germain, une barrière de CRS les attend. Quelques heurts, un peu de lacrymo, et beaucoup de photos plus tard, les manifestants repartent dans l’autre sens, en direction de la Sorbonne. Nouvelle rencontre avec les CRS devant les portes de la fac et nouvelle reculade des étudiants. Ceux qui restent s’emparent alors du boulevard Saint Michel puis se dirigent vers la Gare du Nord. Là, ils se postent sur les voies pour bloquer le départ des trains et appeler à la solidarité avec les cheminots. Juste « histoire de finir sur une opération coup de poing » commente, amusé, un participant.