Requins des mers

Patrick Piro  • 29 novembre 2007 abonné·es

On en parle rarement, tant la réputation de l’animal semble lui assurer une protection suffisante : les requins vont mal, pêchés en excès sur toute la planète, jusqu’à menacer gravement la survie de certaines espèces. Plus largement, ce sont les poissons à cartilage, raies et requins, qui sont concernés. Des scientifiques, réunis en colloque à Brest jusqu’à dimanche dernier, s’alarment notamment de la situation des eaux européennes, où un tiers des espèces de requins (70) et de raies (50) sont en danger d’extinction. En2004, l’Union en a pêché près de 110 000 tonnes, dont la moitié pour l’Espagne, suivie par la France (21 000 tonnes).

La Commission internationale de gestion des thonidés de l’Atlantique (Iccat), qui se prononce sur des espèces pêchées conjointement avec les thons dans les immenses filets des chalutiers, a simplement consenti, mi-novembre à Ankara [^2], à lancer une étude sur la situation des requins-taupes, pourtant en danger critique d’extinction dans l’Atlantique Nord. Pour les scientifiques, c’est un arrêt immédiat des captures qu’il faut décréter dans cette zone.

Mais c’est en Méditerranée que la situation est la plus grave. Selon un rapport de l’Union mondiale pour la nature (UICN), il y a quinze jours, ces eaux seraient les plus dangereuses au monde pour les requins et les raies : sur 71 espèces, 17 sont menacées d’extinction et 13 en danger critique de disparition, dont 2 espèces de requin-taupe. Explication : la pêche dans les fonds marins, où elles croisent, s’est fortement développée, avec des prises dépassant de très loin la faible capacité de reproduction de ces poissons, de surcroît à croissance lente. S’ajoutent des préoccupations concernant les écosystèmes : les requins, grands prédateurs, jouent un rôle clef dans leur équilibre, et l’effondrement de leurs populations aurait des conséquences inconnues en Méditerranée.

Il n’existe presque aucune restriction à la capture des requins et des raies comestibles. Bon marché et à la chair sans arête, ils sont dissimulés sur les étals derrière des dénominations inoffensives ­ chien de mer, saumonette ou veau de mer ­, mais trompeuses, compliquant la compréhension des messages de restriction adressés par les organisations écologistes à l’endroit des consommateurs.

[^2]: Concernant le thon rouge, dont les populations sont en cours d’effondrement, l’Iccat s’est une fois de plus montrée incapable de faire face à la situation, reconduisant des quotas de pêches irresponsables.

Écologie
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