N’oubliez pas les services !

Les élections municipales et cantonales sont l’occasion pour le Collectif francilien de défense et de développement des services publics de lancer une campagne pour une « Charte d’exigence ».

Thierry Brun  • 21 février 2008 abonné·es

Avec le privé, ça marche mieux~!~» , cette affirmation «~idéologique et médiatique, quotidiennement démentie par les faits», a rassemblé contre elle organisations syndicales, associations d’usagers, militants de formations politiques et élus de gauche le 16février. Le Collectif francilien de défense et de développement des services publics a en effet convié une vingtaine de ces organisations à la Bourse du travail de Paris pour témoigner et débattre de l’accès aux besoins fondamentaux que sont le logement, les transports, l’eau, l’énergie, la santé, la fiscalité, etc. Le collectif veut inciter les candidats aux élections municipales et cantonales à «~mener le débat et une activité de promotion du service public~» . Ainsi, une demande «solennelle» sera adressée aux futurs élus et les invitera «à mettre en oeuvre dans le cadre fixé par la loi» plusieurs principes présentés dans une «~Charte d’exigence de service public~». Le collectif compte mobiliser les citoyens pour qu’ils demandent aux candidats «d’agir avec les habitants pour que la collectivité territoriale dont ils font partie reste à tout moment maîtresse des objectifs et de la mise en oeuvre des politiques qu’elle définit, contrôle et évalue en matière de service public et de missions de service public» .

Illustration - N’oubliez pas les services !


Le Collectif francilien de défense et de développement des services publics réuni le 16 février, à Paris. THIERRY BRUN

Pourtant concurrencée par de nombreuses autres manifestations le même jour, la réunion du collectif a été une première illustration de la mise «en convergence» des organisations de salariés, de mouvements citoyens et d’élus. «~Cette dynamique de rassemblement est née du refus des maires de départements ruraux [notamment de la Creuse, de la Charente et du Morbihan] de laisser supprimer un à un tous les services de proximité , a rappelé Patrick Hallinger, secrétaire national du syndicat CGT des fonctionnaires(CGT-UGFF). Lancé à l’automne2004, ce mouvement a réuni 260élus devant la préfecture de la Creuse. Partout on a les mêmes souffrances, partout on a les mêmes besoins fondamentaux~!»

Le cas des franchises médicales et de la Sécu est emblématique «d’une société inégalitaire dominée par les seuls intérêts financiers» , pointée par la charte. Malade du sida, le travailleur social Bruno-Pascal Chevalier, en grève de soins contre les franchises, a pour sa part témoigné «en solidarité avec tous les malades ou futurs malades» pour dénoncer «~les risques majeurs~» de la franchise médicale. «~De plus en plus de personnes n’ont plus accès à la santé. Et, partout, les gens se mobilisent, 500signatures ont été récoltées à Sainte-Geneviève-des-Bois~» , explique le gréviste, ajoutant que le Collectif national contre les franchises en a reçu plus de 300000. De son côté, Françoise Nay, du Comité de défense de l’hôpital Jean-Rostand d’Ivry, a témoigné du cas des maternités: «~Aujourd’hui, pour 8 000naissances annuelles, le Val-de-Marne Ouest ne compte que deux maternités pour plus de 430 000habitants ! Environ 4 ~ 000~naissances ne peuvent être accueillies sur ce secteur. Le gouvernement fait le choix de maintenir une inégalité territoriale de santé en transférant les moyens de la maternité publique Jean-Rostand vers l’hôpital Bicêtre !~»

Autre sujet de mobilisation et de débats, les transports franciliens et nationaux. «~La SNCF est de moins en moins un service public, et de plus en plus une entreprise commerciale à deux vitesses. Elle donne la priorité aux trains qu’elle considère comme son « tiroir-caisse », comme le TGV, Thalys et Eurostar, au détriment des trains de banlieue et des trains régionaux~» , résume Jean-Claude Delarue, président de la Fédération des usagers des transports et des services publics(FUT-SP).

«~Il s’avère aujourd’hui que les collectivités locales vont être mises « au pain sec »~», alertent aussi les porte-parole du collectif, qui ajoutent que Nicolas Sarkozy s’est engagé à réduire de moitié l’évolution de la dépense publique. «Le gouvernement impose aux communes, intercommunalités, départements et régions, comme à l’État, un budget bloqué en volume. Il contraint doublement ces collectivités en réduisant sa contribution à leur budget.» Serge Hulot, maire adjoint de Choisy-le-Roi(PCF), a rappelé que l’Association des maires de France, l’Association des maires ruraux de France (AMRF) et l’Association des petites villes de France (APVF) «demandent une réforme du financement des collectivités locales» , et a expliqué «qu’une taxation des actifs financiers des entreprises de 0,5~% dégagerait 25milliards d’euros et permettrait de créer une caisse nationale de péréquation. Mais on n’a pas le courage d’aller chercher l’argent là où il est~!» .

Preuve que cette convergence d’organisations peut convaincre les élus: le sujet sensible de l’eau a fait bouger la mairie de Paris. Le collectif Eau à Paris, pour la remunicipalisation, n’a pas manqué d’évoquer les déclarations de Bertrand Delanoë, annonçant qu’une régie autonome verrait le jour en 2009, s’il est réélu. Mais «le maire de Paris fait aussi un éloge inacceptable du « partenariat public-privé » et dit vouloir réintroduire Suez-Lyonnaise des eaux et Véolia, dont il salue la « réactivité », « l’expertise » et les « compétences »» . Comme le résume la Charte d’exigence de service public, laisser des intérêts privés particuliers s’emparer des services publics, «c’est vouer ces politiques aux logiques de la commercialisation et de la mise en concurrence, génératrices d’inégalités» . Mais de là à passer à l’acte, le pas n’est pas encore franchi.

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