Courrier des lecteurs Politis 995
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«Penser global, agir local»
La droite se défend d’avoir perdu les élections. Nicolas Sarkozy, par un effort surhumain, s’est fait (un peu) oublier. C’est peut-être le premier geste présidentiel dans son mandat.
«Les Français nous disent qu’ils veulent plus de réformes, plus vite.» Comment peut-on se moquer à ce point des électeurs, qui sont des citoyens? Metz est à droite depuis que le suffrage universel existe, en 1848. Elle est passée à gauche. Le discours du gouvernement peut se traduire ainsi: les électeurs ont voté à gauche pour que nous soyons encore plus à droite. C’est stupide. Mais c’est peut-être le nouveau slogan élyséen! Après «travailler plus pour gagner plus», nous avons droit à «voter à gauche pour être à droite».
Finalement, il n’y a que ceux qui n’ont plus d’ambition qui se payent le luxe d’être sincères. Le maire de Bordeaux ose, contre le discours officiel, dire qu’il aurait aimé travailler avec Bayrou. Mais alors, peut-on croire le PS lorsqu’il dit que le gouvernement doit «corriger sa politique» ? Finalement, il n’attend qu’une chose, que la droite se plante pour cueillir le pays.
Il paraît que l’écologie a dépassé les clivages politiques. Mais l’écologie, c’est aussi celle de l’esprit. La pollution (et cela, les Grecs l’avaient compris) est en nous avant d’être dans l’air. Une des idées majeures du développement durable, c’est le fameux «penser global, agir local». Les élections municipales ne sont-elles pas une application de ce principe? Pas du tout, nous dit-on, il n’y a aucun rapport entre les enjeux locaux et nationaux. Pourtant, on dit qu’une Bourse qui bat de l’aile à New York provoque une vague de licenciements en Europe…
Mathieu Yon, La Baume-Cornillane (Drôme)
À propos d’une «~division suicidaire~»
Si le numéro traitant de la situation à Toulouse faisait preuve d’une certaine retenue, l’article sur les élections municipales paru dans le n° 993 de Politis appelle de notre part quelques commentaires. « La division des listes antilibérales était suicidaire. À elles deux, elles auraient recueilli plus de 10 %. » Vu de loin, cela peut apparaître comme du bon sens, celui d’une banale arithmétique, le seul problème est que la suite de l’article ne donne pas la clef pour résoudre ce dilemme toulousain, pour la simple raison qu’il n’y a pas de clef. Ce qui semble être le bon sens près de chez vous est en réalité une divergence politique essentielle que nous pensions avoir résolue dans le cadre de la présidentielle et qui a ressurgi à Toulouse au point de diviser le camp antilibéral. Le parti socialiste a quant à lui résolu le problème à travers le refus de toute fusion avec les listes à gauche de la gauche.
Politis aurait dû prendre quelques précautions en écoutant tous ceux qui ont travaillé à la construction d’une liste unitaire. […] Si nous [« l’Appel unité antilibérale »] avons constaté avec « l’Alternative Midi-Pyrénées » (AMP) et « l’Autre Liste » que, concernant les programmes, peu de chose nous séparait comme à la présidentielle , la tactique immédiate nous séparait comme à la présidentielle. Lors de la rencontre entre l’Appel unité antilibérale et l’AMP, deux désaccords essentiels surgissent : la tête de liste, comme à la présidentielle, et notre tactique au second tour, c’est-à-dire les relations avec les sociaux-libéraux. Pour nous, outre le fait que nous n’avions pas de candidature à mettre sur la place publique (c’était aussi le point de vue de Motivé-e s), nous avons fait remarquer aux uns et aux autres que notre tête de liste ne serait pas maire de Toulouse… La LCR nous a affirmé quelle ne faisait pas de Myriam Martin une cause de rupture d’unité mais que cette candidature serait défendue dans le cadre unitaire. L’AMP a fait de la candidature de François Simon une rupture.
L’autre désaccord tout aussi important portait sur le second tour et la nécessité de conclure un accord politique débouchant sur des responsabilités dans l’exécutif et la gestion commune de la ville entre le PS et l’Autre Liste. Cela s’est traduit par une campagne de l’Autre Liste tournée en permanence sur l’accord nécessaire du deuxième tour pour mettre en oeuvre une partie du programme. La menace de dénoncer cet accord s’il y avait des divergences importantes dans le conseil municipal n’a pas fait l’objet de la même insistance.
Politis nous aiderait beaucoup s’il recensait au niveau national quelles listes antilibérales ont fait de l’alliance avec le PS au deuxième tour une question de rupture avec d’autres forces antilibérales. On peut regretter, pester, conclure au suicide collectif… mais où est le mode d’emploi pour dépasser ces clivages ? Comment franchir l’obstacle de la tête de liste ? Pourquoi l’accord politique avec les sociaux-libéraux, impensable lors de la présidentielle et des législatives, devient-il possible lors des municipales ? […]
Gilles Da-Ré, syndicaliste,
64e sur la liste «Debout!»
Le chômage des députés (suite)
Dans le n° 994 de Politis , vous publiez un courrier sur le chômage des députés. Ce courrier est mot pour mot un texte qui circule en boucle depuis dix-huit mois sur Internet sous différentes signatures. Seule la date du jour où Jean-Jacques Bourdin l’aurait évoqué sur RMC est régulièrement actualisée.
Cela a d’ailleurs fait l’objet d’un débat sur le site Hoaxbuster en juin 2007. Martine Billard, députée Verte de Paris, avait aussi répondu à l’époque point par point à cette rumeur « antiparlementariste» : la condition du député est certes confortable, mais ce n’est pas la peine d’en rajouter. Seuls quelques députés ceux qui ne sont pas fonctionnaires ni retraités, ni en profession libérale, et qui n’ont pas retrouvé un emploi et, surtout, qui n’ont pas été réélus peuvent en bénéficier. Cela n’a donc concerné en juin 2007 que quelques personnes. Et l’indemnité est bien dégressive, et non « à vie ».
La situation matérielle de la grande majorité des élus en France est très souvent précaire. Ne vous prêtez pas à ce jeu du discrédit gratuit.
Dominique Plancke, conseiller régional, sans protection sociale ni cotisation retraite…
Dont acte.
Dassault à Corbeil
Bernard Langlois, au vert dans la Creuse, a oublié la géographie de la banlieue parisienne. Dassault a bien gardé de peu (et avec les méthodes qu’on lui connaît) sa mairie au deuxième tour, mais il s’agit de Corbeil, dans l’Essonne, et non pas de Créteil, dans le Val-de-Marne, où Laurent Cathala (PS) est élu sans discontinuer depuis 1977. Et cette fois-ci encore au premier tour sans problème, alors qu’il y avait cinq autres listes en présence, dont une Verte et deux d’extrême gauche !
Alain Roch
La liste de gauche à Pau
Dans le n° 993 de Politis , on peut lire au sujet des élections municipales à Pau : « La LCR a fait des percées inattendues dans les grandes villes. Ses listes recueillent entre 5 et 10 % à Saint-Brieux, Alençon, Saint-Malo, Quimper et Pau. »
Cette formulation appelle un rectificatif. À Pau, la liste « Vraiment à gauche » a été conduite par Éric Schlatz, qui n’appartient pas à la LCR.
Conseiller municipal sortant, élu sur une liste « verte et ouverte », Éric a exercé, pendant son mandat, une veille citoyenne efficace et reconnue de tous les Palois (y compris ceux qui n’ont pas voté pour lui). La liste « Vraiment à gauche » pour une alternative écologique, sociale et démocratique était soutenue par le collectif Gauche alternative, la LCR et des Alternatifs. Elle comportait une majorité de citoyens et de citoyennes non encartés syndicalistes ou militants associatifs.
Elle a oeuvré dans un esprit très unitaire mais rétif à toute réduction partisane. Cette précision semble utile au moment où doit s’organiser la « gauche de la gauche ».
Monique Stupar, colistière de la liste «Vraiment à gauche»
Précisions
Dans l’article « Une vitalité croissante », parue dans le n° 994 de Politis (du 13 mars), il est écrit que « La LCR a fait des percées inattendues […], 14,8 % à Sotteville-lès-Rouen (Seine-Maritime) ».
Or, notre liste « Sotteville à gauche vraiment » est une liste d’opposition de gauche qui rassemble des militants et des citoyens, des syndicalistes et des associatifs, antilibéraux, anticapitalistes, altermondialistes et écologistes, soutenue par la LCR et les Alternatifs, et non une liste de la LCR uniquement.
En ce qui concerne le résultat, il est de 14,6 % et non de 14,8 %.
Nous tenons à ce que ce rectificatif soit noté dans le prochain Politis (si c’est possible, naturellement !)
Brigitte Hauduc et Jean-Pierre Rocher (Sotteville-lès-Rouen)
Lutte des places
Feue rouge, Montreuil passe aux Verts. […]
Bien que je ne sois plus montreuillois depuis des années, je reste très attaché à ma ville natale. Une partie de ma famille et de mes amis d’enfance résident encore dans les quartiers populaires du Haut-Montreuil.
J’ai aussi des amis parmi ceux que certains, tantôt avec affection mais parfois avec une regrettable animosité, surnomment les « Bobotreuillois ». […]
En 1978, mes copines et copains lycéens parisiens refusaient de traverser le périphérique et préféraient me donner rendez-vous dans la capitale. Combien de copains perdus de vue car inquiets de prendre le métro jusqu’à la Croix-de-Chavaux ? Combien d’histoires d’amour avortées à cause de la mauvaise réputation de Montreuil ? Cette ville, comme Aubervilliers et d’autres de la ceinture rouge, inspirait une grande peur. […]
Mais, aujourd’hui, beaucoup veulent vivre à Montreuil ou aiment fréquenter ses bars, son théâtre et son cinéma, Le Méliès. Et tant mieux. Cela dit, il est important de rappeler que ce changement positif est le fruit du travail des précédentes équipes municipales. Sans l’oeuvre au quotidien bien sûr critiquable et perfectible de ces équipes et des employés communaux, la plupart des nouveaux habitants n’auraient pas élu domicile dans la patrie de Méliès et des murs à pêches. […]
L’équipe municipale battue, comme tous ceux qui prennent des responsabilités, a bien sûr commis des erreurs. Et Jean-Pierre Brard, l’ancien maire, même s’il aime (qui trop embrasse mal étreint) indéniablement sa ville, ne pourra faire l’économie d’une autocritique. Mais force est de reconnaître le travail opéré depuis de longues années sur le plan de l’éducation, des loisirs, de la mixité sociale, de la culture, de la laïcité, et beaucoup d’autres choses. À titre d’exemple, le Salon du livre de jeunesse de Montreuil a vu très modestement le jour dans les centres de loisirs de cette ville. Rares sont ceux qui rendent hommage à Rolande Causse, initiatrice souvent oubliée de ce projet, qui a offert des bibliothèques à beaucoup de gosses nés sans livres. […]
Quant à Dominique Voynet, l’heureuse élue, je ne la connais qu’à travers les médias. Évidemment, les couteaux de la cuisine électorale sortent à chaque coin de rue. Et, comme toujours, les gagnants et les ralliés tout frais d’après scrutin tirent à boulets rouges (verts) sur les perdants. La stature nationale de la future maire pèse lourd dans la balance des médias. […]
Mais, aujourd’hui, je pense surtout à deux personnes. Ma mère, citoyenne depuis une cinquantaine d’années à Montreuil, n’a pas voté. Abstentionniste ? Non. Mitterrand, Jospin et les autres n’ont jamais voulu lui accorder le droit de vote. Pourtant, ils le lui avaient souvent promis. Étrange que cette très ancienne Montreuilloise ne puisse élire son maire et qu’une autre femme, citoyenne de cette même commune depuis cinq ans, soit devenue son maire. Difficile à comprendre et à accepter.
La seconde personne est Marcel Dufriche : ancien maire communiste de Montreuil, décédé en 2001. Cet homme, déporté et grand résistant, avait de profondes convictions. Après avoir offert ses idéaux et son énergie aux Montreuillois, il donna son corps à la science. Dernier acte de résistance d’un humaniste. Comment jugerait-il la politique d’aujourd’hui ?
Cette politique de lutte des places.
Mouloud Akkouche, écrivain
Liste citoyenne à Poitiers
Dans le n° 993 de Politis , l’article de Michel Soudais rendant compte de la vitalité croissante de la gauche antilibérale indiquait le sourire de contentement d’Olivier Besancenot le soir du premier tour.
L’article précisait que « la Ligue a fait des percées inattendues dans des grandes villes » et citait l’exemple de Poitiers. Le choix de cet exemple mérite quelques précisions. La liste qui s’est présentée aux élections et a obtenu 6,24 % des voix s’intitule liste citoyenne « Pour une alternative à gauche » (PAG), soutenue par la LCR et les Alternatifs.
La campagne a été menée collectivement, et la liste a été animée par un duo, Maryse Desbourdes (LCR) et Bruno Riondet (Alternatifs). Notre camarade Maryse Desbourdes est donc l’élue de « PAG » plus que d’une organisation.
En raison du mode de scrutin, qui favorise les listes obtenant les plus gros scores, la liste « Gauche plurielle », avec 54 % des voix, est créditée de 75 % des sièges de conseillers, et nous n’avons pas pu obtenir deux élus. Mais le caractère collectif de notre démarche, associant non seulement les organisations (LCR et Alternatifs) mais aussi de nombreux militants antilibéraux non encartés, se poursuivra au-delà de ce bon résultat. Conformément à notre conception de la politique […], nous avons d’ailleurs déjà retenu le principe d’une rotation à mi-mandat.
Danielle Tarfaoui, n°3 sur la liste PAG