Des Vélib’ pour les beaux quartiers
dans l’hebdo N° 992 Acheter ce numéro
Vélib’ côté cour, c’est «marche ou crève, le code du travail est totalement bafoué» , explique Thibault Prenez. Licencié en novembre dernier (en conciliation début mars) du service d’entretien Cyclocity de JCDecaux, où il montait une section du syndicat Solidaires, il raconte la face peu reluisante de la gestion au quotidien du parc de vélos parisiens: personnel mal équipé, harcelé par des «petits chefs», viré pour des motifs remontant à plusieurs semaines, trimbalant des sacoches de 25 kilogrammes de matériel de dépannage sur des vélos sans assistance électrique, «contrairement aux promesses» , etc. La régulation du nombre de vélos dans les stations ne se fait pas aussi naturellement que prévu, et le personnel est en surchauffe. «On passe notre temps à sillonner Paris.» Avec des camionnettes qui laissent plus qu’à désirer, selon Thibault Prenez: sans feux de recul ni frein de remorque, manquant de puissance pour leur charge, etc. Et des consignes de régulation pour le moins curieuses: «On a instruction explicite de remplir prioritairement les stations du quartier où le patron va déjeuner, ainsi que certains arrondissements VIIe, VIIIe, XVIe et XVIIe côté beaux quartiers, ainsi qu’autour de l’Hôtel de Ville, surtout en fin de semaine! Et ordre de ne plus prendre aucune initiative personnelle, même en cas de déséquilibre flagrant de stations le long de nos parcours.»
Dernière invention: faire tourner les camionnettes la nuit, à raison de 8 chargements par manutentionnaire, soit 3,5 tonnes par période. Bref, une vraie charge contre la gestion de JCDecaux, dont la mairie de Paris semble avoir pris conscience. «Quatre directeurs des relations humaines virés en quelques mois, c’est voyant!»
Quant aux vélos, il est admis qu’environ un tiers est en réparation. «Les dépôts en sont pleins. Après les chaînes et les paniers, ce sont les moyeux qui rouillent et cèdent, avec le temps pluvieux. À Paris, on a vraiment l’impression que Decaux tire sur la corde pour réduire ses coûts.»