« Deux fers au feu »
Le parti d’Olivier Besancenot, mieux implanté qu’en 2001, veut avoir des élus. Il expérimente aussi les contours du nouveau parti anticapitaliste qu’il veut lancer.
dans l’hebdo N° 992 Acheter ce numéro
Olivier Besancenot ne conduit aucune liste. Il n’est pas non plus candidat. Mais, signe de l’importance que la LCR accorde aux municipales, le porte-parole de la LCR a pris un congé sans solde pour sillonner la France et soutenir les quelque 200 listes présentées ou soutenues par la Ligue. Un record qui atteste l’implantation croissante de la LCR après les scores encourageants de son candidat aux présidentielles de 2002 (4,2 %) et de 2007 (4,1 %). Pour mémoire, la formation trotskiste n’avait présenté que 93 listes en 2001, dont 70 listes LCR pur sucre sous l’appellation « 100 % à gauche ».
Ce surcroît de listes traduit aussi autant la volonté de la Ligue de s’élargir que son attractivité dans la mouvance antilibérale. Car si le nombre de listes sans alliance reste globalement stable, celui des « listes unitaires » associant d’autres formations ou groupes locaux communistes, alternatifs, écologistes ou citoyens est en forte augmentation. Dans les villes où elle est implantée, la LCR a en effet engagé, dès cet automne, des discussions sur la constitution d’un nouveau parti anticapitaliste. Elle a approché des sympathisants, syndicalistes ou militants associatifs, mais aussi des associations politiques locales et des collectifs. Sans cacher que la constitution de listes aux municipales était une étape dans la construction de ce nouveau parti. Une démarche pas toujours couronnée de succès.
La LCR présente ainsi des listes dans onze des vingt arrondissements parisiens (Ve, IXe, Xe, XIe, XIIe, XIIIe, XIVe, XVe, XVIIIe, XIXe et XXe), en faisant l’impasse sur plusieurs arrondissements tenus par la droite. Des listes « 100 % à gauche », sauf dans le XIXe, où la LCR s’est unie avec des militants du PCF et des antilibéraux. Ailleurs, les discussions ont échoué. « La LCR a formulé des exigences inacceptables sur le choix des têtes de liste proposées conjointement par les collectifs et les Alternatifs 75 » , explique Fernanda Marrucchelli, qui conduit dans le XXe arrondissement une des trois listes alternatives se réclamant de José Bové.
Si les divergences nées de la recherche d’une candidature unitaire à la présidentielle ont souvent pu être aplanies, comme à Marseille, où la LCR est une des composantes des listes « Marseille contre-attaque à gauche », à Lyon, où elle figure sur les listes Audaces, aux côtés notamment de militants de la décroissance, Nice (« Nice citoyen et altermondialiste ») ou Montpellier (« Vraiment à gauche »), tous les contentieux n’ont pas été effacés. En témoigne la concurrence de listes antilibérales à Toulouse ( Politis n° 991), mais également à Béziers, où une liste « unitaire, communiste, 100 % à gauche et solidaire » rivalise avec celle issue du Collectif unitaire antilibéral local, « Citoyens à gauche ! ».
Forte de cette mobilisation sans précédent, qui lui assure une visibilité dans 36 des 37 villes de plus de 100 000habitants, ainsi que dans la plupart des villes emblématiques pour leurs quartiers populaires, la LCR a dans cette campagne « deux fers au feu » , suivant l’expression de Sylvain Pattieu, tête de liste dans le Xe arrondissement de Paris : gagner des voix et peut-être des élus, et multiplier les appels et les réunions « pour lancer le parti anticapitaliste » que la LCR veut construire. D’où l’implication d’Olivier Besancenot, qui distille un discours bien rodé où « l’indépendance » à l’égard de la gauche traditionnelle fait figure de maître mot.
« Après dix mois de résistance, c’est l’occasion d’envoyer une grande claque à l’UMP » , explique-t-il. Sans oublier de s’en prendre à « une certaine gauche qui appelle à voter utile alors qu’elle a été aux abonnés absents quand il y a eu des occasions d’aller au carton contre Nicolas Sarkozy » .
Appelant à « voter pour ce qu’on pense vraiment » , le porte-parole de la LCR assure que les élus des listes de son parti seront des conseillers municipaux « indépendants » et « autant de délégués du personnel pour les habitants des quartiers populaires », chargés d’expliquer à ces derniers « ce qui se trame dans les institutions » et de relayer « les combats sociaux » . Pour cela, la LCR n’exclut pas, là où ses listes auront franchi le seuil de 5 %, des « fusions techniques avec la gauche plurielle » . Sans toutefois « jamais siéger dans l’exécutif » municipal.