En finir avec la peur
dans l’hebdo N° 997 Acheter ce numéro
15000 à 20000 manifestants à Paris selon les organisateurs, 4200 selon la police. 2000 personnes à Lyon, quelques centaines à Marseille, Toulouse, Metz, Thionville, Angers… Il n’y avait pas tant de monde que ça dans les rues le 5 avril, jour de protestation contre la politique d’immigration du gouvernement, au regard des gestes désespérés auxquels elle conduit certains sans-papiers. Comme Baba Traoré, un Malien de 29ans, mort la veille à Joinville-le-Pont d’un arrêt cardiaque après avoir sauté dans laMarne en voulant échapper à un contrôle de police. Il était arrivé en France en 2004 pour donner un rein à sa soeur, chez qui il vivait. Il travaillait pour des entreprises de nettoyage et du bâtiment, ne se cachait pas. Mais sa demande de carte de séjour était examinée en appel et, d’après la préfecture, il était sous le coup d’un arrêt de reconduite à la frontière. Le 4 avril, la cinéaste Marie Vermillard passait justement à Joinville: «J’ai vu le jeune homme dévaler l’avenue, les deux policiers derrière lui, raconte-t-elle dans leMonde du 8avril *. Je me suis dit que lorsqu’on est poursuivi, on trouve toute l’énergie dans son corps pour aller vite, qu’on est irrattrapable…»* Le soir, elle apprenait le décès du jeune homme.
Stop à la chasse aux sans-papiers!, clamaient les collectifs qui manifestaient samedi dans la capitale. «Chaque jour, la descente dans l’ignominie s’accélère. Cet acharnement répressif brise et tue des êtres humains», disait l’appel à manifester lancé par Uni(e)s contre une immigration jetable, le Collectif des sans-papiers et le Réseau éducation sans frontières. Ivan, Tchétchène de 13 ans resté dans le coma après avoir tenté de fuir avec son père par un balcon ; Chulan Zhan Lui, Chinoise qui s’est défenestrée l’année dernière à Paris ; John Maina, jeune Kenyan qui s’est pendu en février à Meudon… Baba Traoré est la nouvelle victime d’une politique d’acharnement qui frappe les sans-papiers mais aussi, plus largement les étrangers, Français d’origine étrangère et personnes solidaires des sans-papiers. Une politique qui fait de la France un pays où l’on peut mourir pour défaut de titre de séjour.