Les collectifs davantage unitaires
Lors de la réunion de leur coordination nationale, les collectifs antilibéraux se sont mis d’accord sur un nom ainsi que sur une ligne politique : rassembler largement à gauche.
dans l’hebdo N° 997 Acheter ce numéro
La coordination nationale des collectifs antilibéraux a réuni 94 délégués des collectifs de 38 départements, les 29 et 30 mars à Saint-Denis. Après la désillusion de l’élection présidentielle et les doutes sur la ligne politique à défendre, la réunion a marqué un double renouveau. Le premier est générationnel : « Sur les 90 délégués présents, une bonne quarantaine avaient entre 30 et 45 ans », raconte Pierre Cours-Salies. Le second, plus inattendu, est la démonstration que les collectifs peuvent surmonter leurs désaccords. « C’était extrêmement positif de voir des gens qui acceptaient de débattre ouvertement et s’efforçaient de faire émerger des convergences », se réjouit-il. Mais qu’est-ce qui explique ce regain d’espoir, et à quelle ligne politique ces « convergences » aboutissent-elles ?
Lors des assises des collectifs antilibéraux, en décembre 2007.
Michel Soudais
Les élections municipales ne sont pas pour rien dans ce nouveau dynamisme. En se lançant dans la bataille, les collectifs ont vu le nombre de leurs militants augmenter et revendiquent une quarantaine d’élus. Pourtant, la stratégie définie lors des assises de décembre comportait des risques. Il s’agissait de garder la souveraineté des collectifs locaux tout en parvenant à créer une structure fédératrice au niveau national. Ce difficile équilibre pouvait entraîner une certaine cacophonie entre les différents collectifs. En outre, la création d’une structure nationale pouvait s’apparenter à un parti politique de plus et étouffer les initiatives locales. Mais c’est bien selon les enjeux locaux que les collectifs se sont impliqués dans les élections municipales. D’où des listes communes avec la LCR. Les collectifs étaient en effet présents sur 57 listes conduites ou soutenues par la LCR, « qui ont présenté de meilleurs résultats que celles où la LCR était en petit comité » , précise Yves Salesse. Mais ils ont également noué des alliances avec le PCF, le PS et les Verts dans des listes d’union de la gauche.
Alors, cacophonie? Les collectifs sont-ils partagés entre ceux qui veulent l’indépendance par rapport au PS et ceux qui optent pour une alliance plus large, comme celle qui avait vu la victoire du « non » au référendum sur le projet de constitution européenne en 2005 ? Les motions adoptées par la coordination nationale du 29 et 30 mars montrent que l’objectif est bien le rassemblement. « C’est une nécessité absolue de créer un rassemblement de toutes les forces du « non » de gauche du 29 mai, des courants politiques et des partis politiques » , stipule la motion adoptée.
Ce consensus s’exprime dans plusieurs autres décisions de la coordination nationale, qui visent toujours l’équilibre entre le local et le national. « Les motions votées dans le cadre de la coordination sont issues des discussions des collectifs et ne visent pas à créer un quelconque centralisme » , rappelle le texte. Les délégués se sont même mis d’accord sur l’existence d’un budget et d’un local pour la coordination. Même méthode pour la tenue des États généraux de la gauche de transformation sociale, « le plus rapidement possible, c’est-à-dire d’ici à l’été , explique Pierre Cours-Salies. Les collectifs vont d’abord organiser localement leurs propres états généraux. Puis, au niveau national, les états généraux suivront dans la foulée. » Un appel
[^2] lancé dans les Bouches-du-Rhône illustre déjà cette démarche. Il propose « une rencontre en vue de mettre en place un espace unitaire départemental et de prendre contact avec les initiatives similaires qui se développent dans d’autres départements et au plan national » .
Autre décision, la dénomination nationale du mouvement reste la même : « Coordination nationale des collectifs unitaires. Pour une alternative au libéralisme » . Une manière d’insister sur la « continuité à assurer » . Mais une nuance symbolique est toutefois à noter. Choisir collectifs « unitaires » et non plus « antilibéraux », c’est déjà vouloir rassembler « les multiples expériences, les divers courants d’idées et les différentes pratiques sociales pour qu’un autre monde soit possible », précise la motion.
C’est la même ligne qui s’exprime quand les collectifs clarifient leur position par rapport au nouveau parti anticapitaliste de la LCR. Après avoir rencontré une délégation de la direction de la LCR, le 17 mars, la Coordination « constate que le projet de la LCR ne correspond pas à notre démarche unitaire et de rassemblement, et que la LCR n’entend construire que sur des adhésions individuelles, sans dialogue organisé avec d’autres courants. La Coordination considère que les collectifs n’ont pas vocation à être, en tant que tels, partie prenante de cette construction » , affirme le texte. La coordination prend ainsi acte du fait que le chemin du rassemblement unitaire est encore ouvert.