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dans l’hebdo N° 1002 Acheter ce numéro
Non, nous n’entrons pas en politique. Ni notre journal, ni – et pas davantage – l’auteur de ces lignes. Nous sommes simplement préoccupés depuis plusieurs mois par une interrogation démocratique dont nous n’avons évidemment pas le monopole : comment organiser cet espace politique abandonné chaque jour un peu plus par le principal parti qui s’identifiait historiquement à la gauche ? Cette offre nouvelle que nous appelons de nos vœux, il ne nous appartient pas de la créer (nous en serions d’ailleurs incapables), ni de dire ce qu’elle doit être. Ce sera l’affaire des nombreux talents qui y travaillent déjà depuis longtemps, et de talents neufs qui vont éclore. En revanche, ce que nous pouvons faire, nous, c’est essayer de rendre possible le débat, d’en créer les conditions, d’en poser le cadre avant de nous éclipser sur la pointe des pieds. C’est le sens de l’appel que nous publions ci-contre. Disons-le tout de suite, la démarche a été accueillie avec beaucoup de chaleur et, parfois, d’enthousiasme. Nous en déduisons que c’était le moment. À bonne distance des échéances électorales. À la veille de ces mois d’été propices à la réflexion. Et au cœur d’une période de mobilisation sociale. Quant au texte lui-même, nous l’avons voulu pluraliste et ouvert. Et merci à ceux qui l’ont signé en dépassant des critiques souvent pertinentes. Ils ont compris que l’essentiel, à ce stade, n’est pas là.
De notre côté, nous respectons les raisons de certains de ceux qui n’ont pas signé. Le plus souvent, il s’agit d’incompatibilité avec un mandat syndical ou associatif. Parfois d’une volonté rénovatrice qui porterait davantage sur les formes de la politique. Nous collerions de trop près à l’ancien. La référence à Die Linke a pu renforcer cette impression : un bout de social-démocratie antilibéral et un ex-PC retapé, et vogue la galère ! Mais, cette référence, nous l’interprétons autrement. Nous la voyons comme l’exemple encourageant de l’investissement réussi d’un espace politique en jachère. Après cela, compte tenu de notre histoire, et de l’importance de certains courants de pensée, davantage engagés dans l’écologie, par exemple, ou dans la voie de la décroissance, on peut prendre les paris que rien ne sera à l’identique chez nous. Ce qui est sûr cependant, c’est que c’est dans la dynamique du débat que des formes nouvelles peuvent naître, et non en les déclarant a priori obsolètes, ni en demandant à des militants de renoncer à leurs engagements. Le PC, la LCR existent, comme il existe une gauche du PS et une gauche des Verts, des Alternatifs, et d’autres. C’est avec ces forces-là qu’il faut rebâtir une vraie gauche. Mais pas seulement ! Et là est peut-être la principale difficulté. C’est aussi en puisant des énergies nouvelles dans le mouvement social et associatif, dans les formes de politique en réseaux, dans l’humanitaire que nous pourrons dépasser l’ancien.
Au passage, vidons la querelle des mots. Ce que nous entrevoyons n’est surtout pas une « extrême gauche », ni même une « gauche de la gauche », mais au point où nous en sommes, une vraie gauche, réellement sociale, écologiste et européenne. Nous nous sommes donc adressés – excusez la tautologie – aux forces existantes. Dans la liste qui suit, nous n’avons pas mis les points sur les « i », mais le lecteur reconnaîtra des animateurs des collectifs antilibéraux, des Verts de gauche, des communistes dans leur diversité, des républicains sociaux, un responsable de la LCR, minoritaire il est vrai, des socialistes de gauche, mais aussi des responsables syndicaux et associatifs, des artistes, des intellectuels, des éditeurs, des journalistes… Des femmes et des hommes qui n’ont guère l’habitude de signer des « appels ». Nous avons aussi informé de notre démarche Alain Krivine et Jean-Luc Mélenchon, l’œil rivé, l’un et l’autre, sur d’autres échéances
[^2]. Nous leur redisons ici qu’aucun objectif particulier n’est incompatible, selon nous, avec l’échange, la confrontation et le débat dans un cadre plus large. Celui que nous proposons.
Au total, nous n’avons pas cherché, pour cette première liste, le nombre, mais la présence symbolique. Exemple : Yves Salesse et Pierre Cours-Salies incarnent à nos yeux une même sensibilité. Pardon à celui des deux qui ne figure pas dans cette première liste.
Nous pourrions multiplier les exemples. Par ailleurs, nous avons conscience d’une sous-représentation des régions. Nous l’espérons provisoire puisqu’à partir de ce jeudi nous invitons à une signature plus large de ce texte [^3].
Et nous reparlerons de la suite la semaine prochaine : réunions en régions et (pourquoi pas ?) initiative nationale à la rentrée de septembre. Mais quel meilleur « baptême » pour notre appel qu’une immersion dans la grande manifestation d’enseignants de ce jeudi ! Une façon d’être d’emblée au cœur de cette résistance sociale sans laquelle il n’y aurait pas d’avenir politique.
[^2]: Nous n’avons volontairement sollicité aucun des trois « B », candidats à la présidentielle, Besancenot, Bové, Buffet. Deux d’entre eux ont au moins des très proches dans cette première liste.
[^3]: Un site est ouvert pour cela en lien avec le site de Politis : .
Une analyse au cordeau, et toujours pédagogique, des grandes questions internationales et politiques qui font l’actualité.