C’est quoi, une gauche écolo ?

Jean-Louis Gueydon de Dives  • 26 juin 2008 abonné·es

C’est la faute à Politis : ils ont lancé cet appel à la constitution d’une «gauche réellement écologiste» , et du coup je me suis demandé ce que cela pouvait bien vouloir dire. L’écologie est-elle de gauche ou de droite ? Ni l’un ni l’autre ? J’avoue qu’il n’est pas simple de répondre… Car tout le monde est écologiste, ces temps-ci, et pour la justice, le progrès ou la vie moins chère. Alors pourquoi la gauche serait-elle nécessairement plus écologiste que la droite ?

Deux éléments factuels peuvent éclairer un peu cette épineuse question. Je constate que, généralement, ce sont les entreprises qui déversent leurs pollutions dans l’environnement. Dans la mesure où la droite (et une partie de la gauche) place systématiquement la défense des intérêts économiques au-dessus de toute autre considération, il est difficile de croire à sa conversion à l’écologie… Et je constate également que la droite (et une partie de la gauche) est favorable à une déréglementation générale afin de favoriser la liberté d’entreprendre. Dans la mesure où les questions environnementales nécessitent au contraire la mise en place de contraintes réglementaires, voire pénales, je ne peux que douter de sa conversion à l’écologie…

En posant ainsi le problème, je sous-entends qu’être «réellement écologiste» suppose de réglementer et de s’opposer aux intérêts des industriels pollueurs. C’est un point de vue qui, bien sûr, n’est pas partagé par tous, et surtout pas par les libéraux de droite comme de gauche, qui préfèrent collaborer avec les industriels et s’en remettre aux mécanismes du marché.

Au passage, les libéraux s’accordent une petite erreur sur le sens du mot «liberté», qui n’a jamais signifié le droit de polluer son voisin en toute impunité. Ainsi, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1793 la définit comme «le pouvoir qui appartient à l’homme de faire tout ce qui ne nuit pas aux droits d’autrui»… Qu’en est-il dans la conception libérale de ces «autrui» que sont les animaux, les plantes, la terre nourricière et les générations futures ? Certes, aujourd’hui, ce sont des «sans-droits», mais ne faudrait-il pas justement leur en donner si l’on ne veut pas qu’ils disparaissent à tout jamais ?

Quant aux mécanismes du marché, une chose est sûre : ils bénéficient en priorité aux riches et aux puissants. Un seul exemple : autoriser les gros émetteurs de CO2 du Nord à acheter des certificats émis par les non-pollueurs du Sud, c’est à la fois créer un véritable «droit à polluer» pour ceux qui peuvent se le payer, retarder les efforts nécessaires de réduction des émissions, et inciter les pays du Sud à ne pas se développer, pour ne pas produire le CO2 qu’ils se sont engagés à ne pas émettre. Pas vraiment de gauche, ce truc-là…

Écologie
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