Une politique en flammes
dans l’hebdo N° 1008 Acheter ce numéro
Le feu couvait. Depuis décembre, les alertes se multipliaient dans les centres de rétention (CRA), entre mouvement de protestation et répression. Dans son rapport 2007 sur les CRA, publié le 24~avril, la Cimade dénonçait une aggravation des conditions de rétention et évoquait des automutilations, des tentatives de suicide et des incendies «quasi quotidiens», ainsi que l’enfermement de malades, vieillards, enfants, femmes enceintes… «Une situation sous tension avec des incidents répétés pouvant déboucher sur des incidents graves», avertissait l’association. Deux événements ont fait figure d’étincelles : les déclarations du ministre de l’Immigration, Brice Hortefeux, qui s’est félicité, le 19~juin, d’une augmentation de 80~% des expulsions d’étrangers en cinq mois. Et la mort dans des circonstances non élucidées d’un ressortissant Tunisien au CRA de Vincennes, le 21~juin. Résultat : le feu a pris, au sens propre.
Le 22~juin, un incendie allumé par des retenus a détruit les deux bâtiments du centre. Les retenus ont été transférés ailleurs. 18, intoxiqués par les fumées, ont été hospitalisés. Le 23~juin, un retenu manquait à l’appel, et non cinquante comme l’avait annoncé un premier comptage un peu rapide… Si l’incendie (réel) a été stoppé, la polémique flambe. Le porte-parole de l’UMP, Frédéric Lefebvre, s’en est pris aux défenseurs des sans-papiers : «Il n’est pas tolérable que des “collectifs”, type RESF, viennent faire des provocations aux abords de ces centres au risque de mettre en danger des étrangers retenus», a-t-il déclaré. «L’explication aux événements d’hier à Vincennes est là, dans le désespoir total de chacun des enfermés et dans la concentration du malheur dans une centaine de cellules», a rétorqué RESF. La Cimade a organisé une conférence de presse le 24~juin pour revenir sur le contexte politique du drame et «les conséquences d’une politique du chiffre en matière d’expulsion». Car, avec les murs de Vincennes, c’est bien cette politique du chiffre qui brûle. Reste à savoir si le gouvernement va continuer à attiser la peur des sans-papiers. Ou prendre ses responsabilités.