Courrier des lecteurs Politis 1018

Politis  • 18 septembre 2008 abonné·es

Baba Traoré

Le 4 avril 2008, Baba Traoré, un jeune Malien de 29 ans, s’est jeté dans la Marne à partir du pont de Joinville. Poursuivi par la police à la suite d’un simple contrôle de titre de transport. Il est mort. Il était venu en France pour offrir la vie : il avait donné un de ses reins à sa sœur. Le samedi 6 septembre, au matin, une plaque commémorative a été apposée sur le pont à son nom. Le président du Cran était là. Il a parlé de la France des Lumières, des valeurs de la France : « liberté-égalité-fraternité », de la France qui a eu l’honneur d’accueillir l’assemblée générale des Nations unies en 1948 pour la rédaction de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Il s’est demandé si soixante ans après on proposerait à nouveau à la France d’accueillir cette assemblée. Je me le demande aussi. Très émue, j’en ai parlé l’après-midi même à un ami. Il m’a répondu : « Et où voudrais-tu que cela se tienne alors ? » Je n’ai su quoi dire. Mais où va donc notre planète ?

Anne Le Mouël, joinville-le-pont
(Val-de-Marne)

Éducation à l’environnement

J’ai été très surpris par l’article « Trop peu de cahiers verts dans les cartables », paru dans le n° 1017 de Politis , qui me semble en décalage avec ce que défend votre journal. […] Claude-Marie Vadrot reprend beaucoup des commentaires sans fondement sur ce que serait l’apprentissage : un rôle démesuré accordé au manuel, peu de recul sur ce que seraient les classes vertes, etc. Des recherches sont faites sur l’apprentissage à travers ce qu’on appelle la didactique des disciplines ; elles sont visiblement peu diffusées. D’autre part, c’est la confusion sur ce que serait ou devrait être l’éducation à l’environnement qui est étonnante : l’éducation à l’environnement est officiellement remplacée par l’éducation au développement durable (DD) (BO du 5 avril 2007), ce qui, sans être parfait, donne une légitimité à une approche non seulement écologique, mais en même temps sociale. […]
Enfin, concernant la pluridisciplinarité ou la transdisciplinarité de cet objet, la question mérite plus que des allusions : la transdisciplinarité supposerait dans le second degré la formation d’un corps d’enseignants spécifiques, et, surtout, un appui théorique faible puisque l’environnement, ou le DD, n’est pas une discipline universitaire constituée (c’est-à-dire une communauté de chercheurs qui s’évaluent, se critiquent à travers des cadres théoriques assumés).
D’où un risque insupportable du point de vue de l’école, qui ne semble pas du tout être perçu dans l’article (on a même l’impression que la position de la fonctionnaire du ministère de l’Écologie ne pose pas problème) : il faudrait sortir de la neutralité scientifique. Or, tout comme on n’enseigne pas le catholicisme (cela se fait au catéchisme), mais ce que nous savons par l’archéologie et l’histoire de la vie de Jésus et du développement du christianisme, il serait souhaitable qu’on n’enseigne pas aux élèves les prétendus « bons gestes » pour l’environnement, mais plutôt qu’on les invite à réfléchir scientifiquement sur les conséquences de leurs choix de (futurs) citoyens. Sinon, ce n’est pas la peine d’aller à l’école, il suffit de regarder Nicolas Hulot ou Yann Arthus-Bertrand. D’ailleurs, une phrase de la circulaire officielle le dit très bien : « Le rôle des professeurs est d’apprendre aux élèves à développer leur esprit critique. Il convient de les “éduquer au choix” et non d’“enseigner des choix”. » C’est là que se trouve l’enjeu, peu souvent perçu par les professeurs eux-mêmes. Il est important de critiquer l’institution, mais la critique a plus de chance de porter si elle est précise et fondée. Cela dit, merci encore d’apporter au paysage médiatique français un point de vue différent.

Sylvain Doussot, enseignant

Vive le progrès !

Pour joindre la banque, on fait un 08 et la suite… On a droit à tout un baratin, y compris l’adresse de son agence – où on a l’habitude d’aller les yeux fermés –, et, tout à la fin, on a le droit de prendre rendez-vous avec son « conseiller ». Pendant ce temps, le tiroir-caisse fonctionne à raison d’au minimum 15 centimes la minute. Par ici les sous !
Pour La Poste, là aussi on fait un 08 et la suite […]. On tombe sur une opératrice lointaine qui, après explication du pourquoi de votre demande, toujours à raison de 15 centimes la minute, essaie de vous mettre en relation avec le « chef d’établissement », lequel ne peut répondre. Moi, j’aimais bien « receveur », ça avait un côté convivial. On était censé être « reçu », on avait sa ligne directe. Eh bien, je vais me fendre d’un timbre pour lui écrire, au chef. Je vous le disais : on n’arrête pas le progrès ! Et si on montait une asso pour la renaissance de la convivialité ?

M. Delépine, Élancourt (Yvelines)

En trompe-l’ouïe…

Dis-nous, l’amie FIP, sauras-tu à nouveau faire rimer universalité musicale avec culturel local ? Une dizaine d’années après la suppression de Radio France Toulouse (sous prétexte de faible part de marché), la région toulousaine se réjouit (depuis la mi-juin) du retour sur ses ondes du fil musical et des voix rauques des « fipettes » de la station de service public. D’autres grandes agglomérations, dont Marseille, Montpellier et Rennes, profitent également à nouveau de la même sobre programmation. Mais […] il s’agit – pour le moment ? – d’une décentralisation en trompe-l’œil, car, en l’absence de bureaux relais en région, FIP demeure très parisienne. Ce qui vaut aux oreilles provinciales de recevoir des idées de sorties et des infos-trafic concernant à 90 % la capitale, bien loin donc, notamment, des « ouïes » du Capitole !

David Rouby, Colomiers (Haute-Garonne)

Courrier des lecteurs
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