L’alternative à gauche s’organise

La première rencontre nationale des signataires de **l’Appel de Politis** a réuni 700 participants à Gennevilliers. Un succès qui s’est conclu par l’adoption d’une **« déclaration de principes »** et la constitution d’un bureau d’animation. Retour sur cette journée dans notre rubrique **Politique** .

Michel Soudais  • 16 octobre 2008
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L’alternative à gauche s’organise

Ecoutez les extraits sonores des débats .

Une étape est franchie. La rencontre nationale des signataires de l’Appel « L’alternative à gauche, organisons-la ! » s’est fixé un objectif et une méthode. Refusant de se résigner à la division des forces de la gauche de transformation, sociale et écologiste, les 700 participants à la réunion de Gennevilliers, le 11 octobre, ont « plus que jamais » affirmé « la nécessité d’une nouvelle force de gauche dans ce pays » , une « gauche digne de ce nom » , à la fois unitaire et respectueuse de la diversité des courants qui la composent. Ils se sont aussi entendus sur les moyens à mettre en œuvre pour y parvenir, et ont notamment décidé de nouer un « pacte » et de créer « un cadre permanent de réflexion et d’action ».

Illustration - L’alternative à gauche s’organise


C-M. Vadrot

Tout au long de la journée, « la conscience de la nécessité et le souci de l’unité » ont prévalu. Au terme d’un débat qui a principalement porté sur les réponses antilibérales à la crise économique, sociale et écologique actuelle, la « déclaration de principes » adoptée ne souligne pas seulement « l’impérieuse nécessité de rassembler toutes les forces politiques, syndicales, associatives et citoyennes […] pour faire face aux conséquences dévastatrices » des politiques néolibérales. Elle dresse aussi un programme de travail en listant les « six urgences » de l’heure (économique, sociale, écologique, démocratique, européenne, une politique de paix) sans en faire prévaloir aucune. Des « urgences » qui constituent autant de « chantiers de réflexion et d’action » qui seront soumis à la discussion la plus large.

Car en décidant de solliciter sur ces questions, nationalement et localement, toutes les compétences du mouvement syndical et associatif, ainsi que celles du monde de la recherche et de la culture, les signataires affichent leur ambition : « Parvenir à de véritables propositions alternatives qui stimulent les résistances sociales et les mobilisations ­populaires et que pourrait porter une gauche de transformation sociale et écologique dans toutes les échéances politiques à venir. »
L’assemblée a aussi proposé « la tenue, au début de 2009, d’assises pour un vrai changement » qui préciseraient ces pistes de travail et ­auxquelles seraient associées, « en toute indépendance, l’ensemble des forces intéressées à l’existence d’une alternative authentiquement à gauche ». Enfin, le principe d’un Bureau d’animation composé d’une vingtaine de représentants des régions ainsi que des courants politiques et associatifs parties prenantes de l’Appel a été approuvé. Sa constitution est en cours. Ce bureau, qui déchargera Politis de la gestion du processus initié par l’Appel, aura pour tâche de le faire vivre. Faire circuler l’information, coordonner les initiatives, fixer un calendrier seront ses principales tâches. « Il ne s’agit surtout pas d’élire des porte-parole ou des personnalités qui pourront se prévaloir de cette fonction pour parler en votre nom » , avait prévenu Denis Sieffert, en ouverture de la journée.
Ce bureau a également reçu mandat pour s’adresser à toutes les forces antilibérales, « celles-là mêmes qui avaient mené la bataille ­victorieuse du référendum du 29 mai 2005 » , afin qu’elles s’expriment « en commun » à l’occasion des prochaines élections européennes de juin 2009. Un vœu exprimé par de nombreux intervenants, conscients qu’en cas de dispersion le mode de scrutin – en 2004, il fallait 7 à 9 %, suivant les circonscriptions, pour avoir un élu – risque d’aboutir à ce que le « non » de gauche de 2005 n’ait plus aucun représentant au Parlement européen en juin 2009. « La bataille pour l’unité aux élections européennes est un enjeu central » , a ainsi affirmé Jean-Jacques Boislaroussie, des Alternatifs, tout en admettant que l’Appel de Politis, compte tenu de l’hétérogénéité de ses composantes, n’est peut-être pas le lieu le plus approprié pour cette bataille.
Conscients des divergences qui pourraient naître entre les différentes composantes parties prenantes de l’Appel, notamment à l’occasion de cette échéance, les participants souhaitent que « se noue entre elles un pacte assurant […] la poursuite du travail sur les propositions alternatives » . Un engagement à rester unis par-delà les antagonismes électoraux de circonstance, en quelque sorte.

La même sagesse a conduit les participants à se contenter d’affirmer la nécessité d’une force politique nouvelle. Car si celle-ci fait consensus, il n’en va pas de même sur le rythme à adopter. Pour certains, comme Claude Ganne, de Cap à gauche Saint-Étienne, « avec la crise qui peut éclater d’un moment à l’autre, il y a nécessité de l’immédiateté de la construction d’un rassemblement politique ». Tel était aussi le sens d’un message transmis par le député (PCF) Patrick Braouezec.
D’autres intervenants ont plus simplement manifesté leur volonté d’aller de l’avant, sans attendre. « Pour ne pas être spectateur de la recomposition », explique Gilles Alfonsi, des Communistes unitaires. « Les conditions de l’ouverture d’un processus de construction passe par un démarrage qui n’attende pas que, ne voyant rien venir, les forces disponibles ­s’étiolent » , plaide Pierre Zarka. Son camarade Roger Martelli résume le dilemme : « Rien ne serait pire que la précipitation, mais rien ne serait pire non plus que l’enlisement et l’immobilité. » Yves Salesse, de la Coordination des collectifs unitaires, approuve et interroge : allons-nous « refuser de discuter avec ces ­forces » politiques responsables du « saccage de 2006 », par leur choix « de se construire elles-mêmes contre le mouvement unitaire » , « tant qu’elles n’auront pas fait leur autocritique ? Non. Mais nous allons commencer à construire le cadre unitaire sans attendre leur consentement ».

La fédération en gestation autour des Alternatifs, des Communistes unitaires et des écologistes radicaux, depuis la rencontre estivale de Miremont (Puy-de-Dôme), a bien évidemment été évoquée. Elle séduit les Collectifs unitaires, et certains verraient bien l’Appel participer à ce regroupement. Une telle démarche instrumentaliserait l’Appel de Politis , met en garde Jean-Jacques Boislaroussie en réaffirmant que « tous les courants ont leur place » dans l’Appel, qui doit rester « un lieu où se recousent toutes les sensibilités » . Denis Sieffert avait déjà rappelé l’esprit de l’Appel : « Il ne sert à rien d’avoir une locomotive qui irait aussi vite que le TGV et des wagons qui décrocheraient. »
Or, ce samedi, les wagons étaient bien là. Dans la salle, saluée par le maire communiste de Gennevilliers, Jacques Bourgoin, signataire, se côtoyaient des communistes de plusieurs sensibilités, des Verts critiques, des socialistes comme le député Marc Dolez ou les animateurs du courant Utopia, des militants des Alternatifs, du Mars, des membres du courant Unir de la LCR, d’Attac, des objecteurs de croissance, des syndicalistes ou citoyens engagés… Par courrier, Marie-George Buffet avait fait connaître son intérêt pour la démarche mais aussi son refus d’y associer le PCF. La LCR, quant à elle, avait dépêché un observateur. Bien que non-signataire, Jean-Luc Mélenchon est venu exprimer sa « fraternité de combat » et rappeler l’importance des quatre congrès du PS, des Verts, du PCF et du NPA, qui se tiennent d’ici à janvier. C’est dire si d’ici aux assises quelques wagons supplémentaires pourraient se raccrocher.

Politique
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