Une pollution éhontée

Dans le monde et sur le territoire américain, comme le rappelle un livre d’Al Gore, Bush a délibérément sacrifié la nature et l’environnement. Exemples.

Claude-Marie Vadrot  • 6 novembre 2008 abonné·es

George W. Bush restera l’homme qui a mis vigoureusement en pratique, pour contrer les écologistes, les protecteurs de la nature et les scientifiques inquiets, le sermon productiviste, hautain et égoïste, lancé pour la première fois à la face du monde en 1992 par son père à la conférence de Rio sur l’environnement : « Le mode de vie des Américains n’est pas négociable. » Avec l’aide de Dieu et des milieux industriels, le fils n’a jamais « négocié » et a tout mis en œuvre pour que les États-Unis ne cessent pas de polluer. Au nom de ce credo, il a refusé la ratification du protocole de Kyoto signé par le vice-président Al Gore, constituant même des commissions de scientifiques serviles pour justifier son obstination. Dans un livre récent [^2], Al Gore affirme qu’une filiale d’Exxon Mobile offre une « prime » de 10 000 dollars à tout journaliste publiant un article contestant le réchauffement climatique. Il ajoute : « L’administration Bush a trahi ses responsabilités de protection de l’environnement et a donné carte blanche en matière de politique environnementale aux plus gros pollueurs et autres groupes privés qui, pour la plupart, tentent depuis des décennies d’affaiblir ou de détruire les critères environnementaux. »

L’Amérique de Bush, vouée à la voiture, n’a pas vraiment été ébranlée par l’augmentation, provisoirement calmée, du pétrole. Le président et son congrès ont au contraire largement subventionné la production d’éthanol, qui brûle des millions de tonnes de maïs. Conséquences, outre un avantage climatique nul : destruction et empoisonnement de nouvelles terres, augmentation du prix de certains produits alimentaires, famine dans plusieurs provinces du Mexique, assèchement de nappes phréatiques et accroissement de la pollution des rivières. Les parcs nationaux et les réserves naturelles ont subi des assauts répétés, de nouvelles espèces ont disparu, et la mort des eaux du golfe du Mexique s’est accélérée. L’air pollué des villes a continué de se dégrader en dépit des efforts de quelques cités et États dissidents pour tenter de respecter le protocole de Kyoto.
Il n’est pas certain que le nouveau président, même s’il se nomme Obama, participe positivement à cette amélioration : les mauvaises habitudes écologiques ont la vie dure. Ne respectant pas leur environnement, les États-Unis ne se soucient pas plus de celui des autres, remettant en cause la moindre initiative du Programme des Nations unies pour l’environnement.

En Irak, la situation écologique du pays, la qualité de l’eau à Bagdad, les traces d’uranium, la pollution du Tigre, les déversements de pétrole issus des oléoducs en mauvais état sont toujours au même point qu’en 2003, après les bombardements qui ont détruit de nombreuses usines chimiques et les stations d’épuration de la capitale. Les seuls qui bénéficient d’une certaine qualité de vie sont les habitants de la « zone verte », où tous les Américains et leurs amis irakiens sont réfugiés. Pas un seul dollar des centaines de milliards dépensés en Irak n’a servi à réhabiliter l’environnement, à restaurer les ressources naturelles et à dépolluer.
En Colombie, dans le cadre d’un programme financé par le Congrès américain, des avions déversent sur les forêts et les villages du glysophate, produit plus connu en France sous le nom de Round Up, fabriqué par Monsanto, la société dont l’agent Orange pollua le Vietnam dans les années 1960. Cet herbicide, auquel un tribunal français vient d’interdire de se prétendre « biodégradable », empoisonne depuis plusieurs années les espaces forestiers colombiens sous prétexte de détruire les plants de coca toujours florissants et de viser les refuges des Farc. Avec de graves conséquences pour le milieu naturel, pour la faune et bien évidemment pour la santé des paysans et des populations indiennes.
En Birmanie, à Gaza, dans l’Alberta canadien, en Indonésie, au Chili, en Afghanistan ou dans les Caraïbes – liste non exhaustive –, les États-Unis et leurs entreprises poursuivent la destruction de la nature et de l’environnement.

1: La Raison assiégée, Al Gore, Seuil, 310 p., 21 euros.

Monde
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