Musées – On ne prête qu’aux riches
dans l’hebdo N° 1032-1033 Acheter ce numéro
La culture gratuite, c’est comme la télé sans pub, tout le monde en rêve, mais personne n’y croit. Car la culture a un prix, que quelqu’un doit bien assumer. Si ce n’est le citoyen, c’est donc l’État. Or, l’heure n’est pas à l’engagement de celui-ci dans l’action culturelle. De plus – coup de pot pour le ministère – la gratuité fait débat. Garantir l’accès libre au musée permet-il d’attirer de nouveaux publics ou de favoriser ceux qui s’y rendaient déjà ? C’est la question qui s’est posée, cette année, entre le 1er janvier et le 30 juin, à travers une expérimentation menée par le ministère de la Culture sur 14 musées et monuments nationaux. Objectif : évaluer l’impact de la gratuité sur l’affluence et la diversité des publics. Résultat : l’affluence a augmenté, mais pour les habitués, pas pour les néophytes. Il faut dire que la ministre, Christine Albanel, n’était qu’à moitié emballée par ce projet concomitant avec le débat sur le téléchargement payant. Elle s’est donc érigée en défenseur de la « valeur » de la culture.
Pour l’association Louvre pour tous, la gratuité totale relève de la démagogie. « Si la gratuité peut apporter un sentiment de réappropriation du bien commun, elle ne permet pas à elle seule la démocratisation recherchée. Sans accompagnement spécifique, ni information en amont, elle n’est pas suffisante pour attirer tous les publics. Or, sur cette question, au ministère, on ne propose aucune piste. » Il aurait même été décidé d’interdire « que les politiques des publics et les dispositifs de médiation existants soient radicalement modifiés » pendant la phase d’expérimentation. Des fois que cela ait une influence positive… Pourquoi pas, enfin, un vrai service public des musées ?, s’impatiente Louvre pour tous. Avec, par exemple, un système de pass intermusées, à l’année et à un prix raisonnable. Et une remise de billets gratuits aux familles.
L’esprit n’est pas le même : inviter plutôt que lancer de la poudre aux yeux. Parce que la gratuité toute seule, ça ne rapporte pas grand-chose.