Courrier des lecteurs Politis 1039
dans l’hebdo N° 1039 Acheter ce numéro
Ostracisme J’enrage tous les jeudis matin quand j’entends Ali Baddou, sur France Culture nous informer sur les couvertures de « nos » hebdomadaires.
Étrangement, il n’est toujours question que de l’Express, du Nouvel Obs, du Point, mais jamais (ou alors très exceptionnellement !) de Politis ou de Marianne.
Ceux-là seraient-ils galeux ? Pestiférés ? Et les hebdos cités ne sont pas « mes » hebdos mais « des » hebdos parmi d’autres. Cette formulation est désobligeante pour tous ceux qui ne les apprécient pas et ne les lisent donc pas (même chez leur médecin !).
J’ai déjà fait la remarque auprès de France Culture… visiblement sans beaucoup de succès ! […]
René Le Maout
Crédit risqué Pour le naïf que je suis, je comprends qu’une partie de l’explication de la « crise » actuelle est due au fait que les banques américaines ont consenti des prêts en prenant des risques sur la solvabilité des emprunteurs. Aujourd’hui, en France, les banques ne semblent pas avoir tiré la leçon de leurs homologues américains. En effet, ne sont-elles pas en train de prendre le même risque, lorsqu’on sait que le crédit permanent (revolving) devient la règle en matière de prêt à la consommation ? C’est un crédit accordé pour une durée illimitée, à taux variable, souvent près de l’usure, dont le remboursement est lié à la situation de l’emprunteur. Il s’adresse, du fait de ses facilités d’obtention, aux plus faibles. Dans une période où le chômage augmente et va augmenter, ne court-on pas le risque de voir ces crédits classés « produits toxiques » dans quelque temps ? Et quand on sait que ce crédit permanent est utilisé dans certains cas pour compenser une baisse du pouvoir d’achat des ménages, on voit que le risque est réel (surendettement).
Alain Brunel
Rien de nouveau s ous le ciel du Parti de gauche Opposé au contenu du projet de Constitution européenne mais pas à l’Europe, j’ai participé aux réunions des « Collectifs du 29 mai », espérant qu’à l’issue du scrutin qui nous avait été favorable nous nous retrouverions dans un nouveau parti à gauche de la gauche dite socialiste, qui avait voté pour ce projet. Las ! Les croyances, les coutumes, les us politiques communistes, communistes révolutionnaires, socialistes, écolo-socialistes, socialo-républicains ont fait que nous n’avons pas su nous entendre sur le choix d’un(e) candidat(e) à l’élection présidentielle, réduisant ainsi à néant l’idée d’une nouvelle association politique.
Pourtant, récemment, mais cependant quatre ans après, deux caciques du parti socialiste qui font métier de la politique lançaient le Parti de gauche (PG). J’ai été parmi les premiers soutiens. Or, qu’ai-je constaté, durant ces deux mois d’existence, concernant sa structuration, qui déterminera, on le sait, le caractère plus ou moins démocratique de son fonctionnement ? Un certain nombre de faits qui conduisent à se poser les questions suivantes :
– Est-ce un nouveau parti jacobin de gauche ? Sous un prétexte électoraliste sur lequel je reviendrai, son organisation reprend à l’identique le découpage napoléonien en départements alors même que cette division est considérée comme obsolète au niveau territorial français, encore plus au niveau territorial européen. Ses inspirateurs n’ont pas envisagé une organisation au niveau des régions, des provinces, une structure fédérative comme c’est le cas dans nombre de pays européens. […]
– Est-ce un nouveau parti nationaliste de gauche ? […] « En tant que républicains français, nous prônons l’unité nationale française et l’égalité des droits qui s’y rattachent. » Le mot nation est lancé. Quelle nation ? La nation française construite par des dictateurs […] comme les rois de France, les empereurs […], les Républicains comme Mac-Mahon et Pétain ? […]
– Est-ce un nouveau parti colonialiste de gauche ? « Nous sommes républicains, et donc pour l’unité de la République, cet espace commun de droits et de devoirs, qui permet à tout citoyen, de métropole ou de territoires d’outre-mer, d’être égal. » L’organisation du PG reprend les structures coloniales en intégrant les DOM-TOM. Ses fondateurs ignorent-ils qu’en Martinique, en Guadeloupe, en Nouvelle-Calédonie et dans les autres confettis de l’empire français, il existe des mouvements de libération nationale ? Certains, comme en Martinique, sont au pouvoir ! Mais il est vrai que la France métropole soutient ces mouvements chez les autres mais pas chez elle ! […]
– Est-ce un nouveau parti électoraliste de gauche ? « Les comités locaux s’organisent au niveau des circonscriptions législatives. » L’appétit de représentation semble se faire pressant à l’approche des élections européennes. On sent que les professionnels de la politique veulent garder leur place. Sur le site Internet du parti, ceux ou celles qui soutiennent le PG ont majoritairement un mandat électif au Parti socialiste, faut-il le préciser ? Quid de la démocratie participative ? De l’usage généralisé du référendum ?
– Est-ce enfin un nouveau parti européen de gauche ? Pour ces Républicains à tous crins, ces farouches nationalistes français, ces héritiers du colonialisme français, se revendiquer européens risque d’être difficile. […] L’Union européenne a pour principe fondateur la diversité : des cultures, des coutumes, des opinions, mais aussi des langues, ce qui est naturel sur un continent où tant de langues sont parlées. L’attention sans précédent que suscite aujourd’hui la diversité linguistique s’explique par la multiplication des contacts entre les peuples. Les citoyens sont de plus en plus amenés à devoir parler une autre langue que la leur, que ce soit dans le cadre d’un échange d’étudiants, d’une installation dans un autre pays ou lors de relations professionnelles. […]
Le respect de la diversité linguistique est une valeur essentielle de l’Union, au même titre que le respect de la personne, l’ouverture aux autres cultures et la tolérance. Ce principe vaut non seulement pour les 23 langues officielles de l’Union, mais aussi pour les nombreuses langues régionales et minoritaires qui sont parlées aux quatre coins de l’Europe. […] Malgré tout cela, je soutiens un parti de gauche de l’Union européenne. Mais je pense qu’il est temps en France de faire du neuf et de raisonner à l’échelle des communautés humaines qui vivent dans l’ensemble français. […]
Yves-François Le Coadic
Abonné à Politis, j’en suis un lecteur assidu. Je ne me lasse pas de découvrir vos points de vue et j’irai jusqu’à dire que le fait même que ce journal existe me rassure, tout au moins me réconforte tant je fais partie de ceux qui ont besoin d’un autre traitement de l’information, d’une autre vision du monde et d’autres perspectives d’avenir.
Cela étant, je suis enseignant – plus exactement professeur des écoles – et encore parent d’élève. Et, alors que la crise que traverse le monde de l’Éducation dans son ensemble, alors que la mobilisation des enseignants du primaire et des parents d’élèves concernés existe depuis des semaines, dans des formes nouvelles et inégalées de mémoire – je me réfère là notamment à tous les collectifs qui se sont mis en place partout en France, tant dans leurs modalités de construction et de fédération –, alors que ce que je dénommerai le militantisme citoyen est en train de se construire sur un sceau nouveau, alors que nombre d’enseignants sont ouvertement entrés en désobéissance professionnelle et citoyenne, alors que ceux-là mêmes prennent des risques réels en toute conscience, je ne comprends pas pourquoi vous n’y consacrez pas davantage de places dans vos éditions […].
Christophe Rocherieux
La Bible et l’esclavage Lors de son discours d’investiture, Barack Obama a parlé avec émotion des esclaves qui « ont supporté les coups de fouet », qui « ont péniblement labouré la terre »
de leur pays, mais il ignore apparemment que les propriétaires de ces esclaves, en les fouettant, ne faisaient qu’obéir aux préceptes énoncés dans le livre sur lequel il prêtait serment. « Baguette et réprimande procurent la sagesse […], on ne corrige pas un esclave avec des mots, même s’il comprend il n’obéit pas » (Proverbes, 29-15 et 19). […] Dans la première épître de Pierre (2-18-20) : « Vous, les domestiques, soyez soumis à vos maîtres avec une profonde crainte, non seulement aux bons et aux bienveillants, mais aussi aux difficiles. Car c’est une grâce que de supporter, par égard pour Dieu, des peines que l’on souffre injustement ; Quelle gloire, en effet, à supporter les coups si vous avez commis une faute ? Mais si, faisant le bien, vous supportez la souffrance, c’est une grâce auprès de Dieu. » Le nouveau président états-unien, s’il tient à jurer sur des livres, aurait dû faire un meilleur choix : au lieu d’un ouvrage esclavagiste, pourquoi pas le livre de chevet de Gandhi et de Martin Luther King, la Désobéissance civile, d’Henry David Thoreau, qui s’opposa au servage au point d’aider des esclaves fugitifs à passer vers le Canada, et qui fut emprisonné pour avoir refusé de payer une taxe destinée à financer l’injuste guerre de son pays contre les Mexicains ?
Pedro Scaron, Paris