Courrier des lecteurs Politis 1045

Politis  • 26 mars 2009 abonné·es

Qu’est-ce qui est le plus répréhensible ? Offrir l’hospitalité à un pauvre bougre en situation irrégulière ou profiter de l’hospitalité d’un milliardaire mexicain accusé d’avoir traficoté de la cocaïne ?

Paul Oriol, Versailles

Petite édition et librairie indépendante

Bravo de profiter du salon du livre pour faire un dossier sur la petite édition et la librairie artisanale et indépendante. Les grands médias n’en parlent jamais.
Ce sont en effet les petits éditeurs qui publient de la poésie, des sciences humaines – de plus en plus délaissées –, des textes rares, de beaux livres avec un vrai travail d’imprimeur. Malheureusement, ces ouvrages n’ont guère de relais pour ne pas dire pas du tout.
Certes le Matricule des Anges fait un excellent travail, mais c’est insuffisant pour faire connaître de nombreux livres. Le Réseau des librairies indépendantes est souvent leur unique moyen de diffuser leurs livres. Au Mans, la seule librairie qui diffuse les livres des petits éditeurs est L’Herbe entre les dalles, petite librairie qui fait un excellent travail ; ce qui ne l’empêche pas de galérer, car ses finances sont fragiles.
Il faut soutenir ce réseau fragile de petites librairies, c’est le seul moyen pour que les livres artisanaux et indépendants trouvent une place auprès des lecteurs. Avec une association et une petite revue modeste, nous essayons de le faire au Mans et, bien sûr, d’aider la seule libraire littéraire de la ville.

James Tanneau, libraire retraité

Crise des prisons Versatilité

de l’information : on nous a entretenus pendant quelques jours des problèmes posés par la surpopulation des prisons. Puis plus rien, on est passé à d’autres sujets. À croire le problème résolu par le seul fait d’en avoir parlé.
Peut-on revenir sur cette situation ? 62 744 détenus aujourd’hui contre 55 284 en 1977. Un taux d’occupation des prisons supérieur à 150 % par rapport aux places disponibles et dépassant souvent les 200 %. Comment, dans ces conditions, parler d’un parcours d’exécution des peines qui puisse être positif ? Galéjade ? Hypocrisie ? Rideau de fumée ?
Une autre statistique à mettre en contrepoint : 74,5 % des condamnations prononcées en 2006 étaient égales ou inférieures à six mois de détention. C’est-à-dire des peines correspondant à des délits mineurs. Ne pourrait-on pas, pour ce genre de délits, avec les précautions d’usage, décider que les peines encourues seront des peines alternatives à la détention ? Et se donner, avec l’aide des instances de proximité, les moyens de les mettre en place sans en faire pour autant des « prisons hors les murs » ? […]

A. Faye, Menton

Haine raciale

En Guadeloupe, il y en a qui ont chaud pour leurs privilèges, et leurs amis métropolitains propriétaires de yachts défiscalisés ont cru un moment qu’il faudrait jeter l’ancre ailleurs.

Ce mouvement de tout un peuple longtemps bafoué vient du plus profond, il est celui d’un peuple debout. Il a une organisation, des structures, des responsables, des revendications. Le gouvernement français a fait peu de cas de ces nègres qui se mettaient à revendiquer, à manifester, de plus en plus nombreux, de plus en plus déterminés. Attendre plus d’un mois pour s’intéresser à la question guadeloupéenne, c’est à la fois du mépris de classe et de la haine raciale.

Le Medef et ses sbires de la grande distribution en Guadeloupe ne veulent rien lâcher. […] Ils n’ont pas supporté, les békés, les Jégo et autres gens du Medef, qu’Élie Domota leur parle d’égal à égal. Tous les gens de la bonne société ici et là-bas ont trouvé le prétexte qu’ils attendaient pour crier à « l’incitation à la haine raciale », comme si le sieur Lefèvre de l’UMP, en qualifiant les leaders du LKP de « tontons macoutes », ne proféraient pas des insultes racistes. […]
En métropole, dès qu’il y a grève générale, les patrons menacent à grands cris de quitter le pays, d’aller placer leurs capitaux ailleurs. Bizarrement, aux Antilles, ils s’incrustent et poussent des cris d’orfraie quand quelqu’un leur dit que, dans le cas où ils n’appliqueraient pas les décisions prises, on ne les retiendrait pas.

Élie Domota signifie simplement à ceux qui oppriment la population guadeloupéenne depuis des siècles que ce temps est terminé. Il ne leur dit pas ça parce qu’ils sont blancs, mais parce qu’ils sont des oppresseurs. Élie Domota, le LKP et les Guadeloupéens en grève leur ont fait peur, et ils se vengent. Cette vengeance, nous, travailleurs d’ici, nous ne devons en aucun cas la cautionner. Une pétition de soutien des salariés de l’Hexagone à Élie Domota et au LKP serait la bienvenue et permettrait de manifester concrètement le fait que, dans les propos du leader du LKP, nous avons perçu le refus de subir la domination d’une catégorie bien précise de Guadeloupéens, et que l’incitation à la haine raciale, nous la percevons dans les propos de ceux qui relativisent l’esclavage, dans les pratiques coloniales de l’État français, dans les faits quotidiens qui, ici et là-bas, discriminent les Noirs.

Gisèle Moulié, Vincennes
(Val-de-Marne)

Des bébés « faits maison »

Dans le n° 1042 de Politis, sous la signature de Marion Dumand, un excellent article sur l’accouchement à domicile avec des citations mordantes d’Isabelle Bar (ANSFL), Michel Naiditch (Irdes) et Gilles Gaebel (Ciane). Des chiffres et des arguments d’une grande justesse.
On y parle du « droit au choix, fiable, sécurisé et respectueux des personnes, selon les termes du Ciane » … Je n’ai pas le souvenir de cette expression mais c’est mieux que tout ce que nous avions écrit jusqu’à présent !
Achetez donc Politis pour en « oublier » un exemplaire dans la salle d’attente du gynéco, au-dessus de la pile de Figaro Madame.

Bernard Bel, membre du CA du Ciane

La facture du nucléaire

Construction d’un nouveau réacteur EPR à Penly, en Haute-Normandie : ainsi en a décidé le gouvernement le 30 janvier, après la journée de mobilisation contre la crise. Hélas, le syndicat CGT d’EDF se réjouit, ainsi que les partis socialiste et communiste ! Le maire PCF de Dieppe affirme aussi sa satisfaction.

Ces personnes ont des réactions à court terme que je pensais
– naïvement – dépassées !

Un EPR, c’est 3 à 4 milliards d’euros ; les deux réacteurs de même type actuellement en construction en Finlande et à Flamanville ont pris des mois de retard, et la facture s’est alourdie.
La France a déjà jeté à la poubelle environ 10 milliards d’euros pour le surgénérateur de Malville, désormais hors d’usage, et dont le démantèlement coûte très cher.
Avec cet argent, on pouvait créer 10 à 15 fois plus d’emplois dans les secteurs d’avenir des énergies nouvelles et de l’isolation des habitations, en commençant par les HLM. Avec des chauffages plus performants et une bonne isolation, les citoyens, surtout les plus défavorisées, auraient des charges locatives moins élevées et donc une augmentation de leur pouvoir d’achat.

Les énergies décentralisées et plus locales présentent d’autres intérêts. Prenons l’exemple de la région des Landes, qui subit hélas de plus en plus de tornades : avec son potentiel de biomasse bois, cette région pourrait s’alimenter en électricité grâce à des installations de proximité à base de bois, produire de l’énergie en cogénération, etc.
Cela créerait des emplois non délocalisables et non polluants.
L’électricité devrait beaucoup moins dépendre de lignes à très haute tension, qui sont cassées par les tempêtes et qui créent des pollutions électromagnétiques nuisibles pour les habitants.

Les générations futures devront gérer pour des milliers d’années des déchets nucléaires. Et les démantèlements des centrales sont très coûteux.
En outre, un accident risque d’arriver. Cet été, on l’a frôlé au Tricastin : des barres de combustible sont restées en équilibre instable au-dessus du cœur ; la nappe phréatique a été polluée. Ce n’est pas nouveau. Au Tricastin, les incidents se succèdent depuis trente ans. Mon mari va régulièrement dans l’ex-ferme familiale, à Bollène, à 4 km de la centrale, et il recueille de nombreux témoignages de gens qui ont travaillé sur le site. Des témoignages de plus en plus inquiétants sur un certain laisser-aller concernant la sécurité : les intérimaires, par exemple, ne sont pas bien protégés. Mais les gens semblent défaitistes, il est difficile de résister au lobby nucléaire, soutenu par la gauche PS et PCF, et par la droite. Une manifestation en octobre 2008, la première à Bollène, a eu lieu devant le site nucléaire : nous étions 400 personnes, entourées par des commandos de gendarmerie armés comme si nous étions des terroristes.
Dans cette manif réclamant la transparence après les incidents, seuls deux partis étaient présents, les Verts et le NPA. Où est la « gauche » ? […]
Pour les prochaines élections européennes de juin, la tête de liste des Verts dans le grand Sud-Est sera Mme Michèle Rivasi, fondatrice en 1986 de l’association Criirad, qui avait dénoncé la farce du nuage de Tchernobyl s’étant « arrêté aux frontières de la France ». […]

M. et Mme Roulet

Trop de Sarko

Je n’écris jamais à un journal et j’apprécie de vous lire chaque semaine. Cette fois, je me décide pour vous demander de ne plus contribuer à la publicité de notre Président en « ornant » votre couverture (n° 1042) ou quelque article que ce soit avec son image. Nous le voyons si souvent ailleurs. Merci, et continuez à nous faire réfléchir.

Monique Perrard, Bagnolet

Courrier des lecteurs
Temps de lecture : 8 minutes