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La sollicitude, aliénation féminine ?
Le Sexe de la sollicitude, Fabienne Brugère, Seuil, « Non conforme », 192 p., 16 euros.
« Qui prend soin des nouveau-nés, s’occupe des enfants et des personnes âgées ? Des femmes. Qui, entre une activité professionnelle et des tâches domestiques et familiales, accomplit une double journée de travail ? Encore des femmes. » Il semble aller de soi que les femmes « ont à faire avec le soin, la sollicitude ». Philosophe, Fabienne Brugère examine cette « aliénation » des femmes que leur dicte la société dès leur plus jeune âge. Combinant les approches de la philosophie morale et les gender studies anglo-saxonnes, l’auteure tente de penser la possibilité d’une nouvelle sollicitude, pour en libérer les femmes, sans « mettre en péril la démarche éthique du souci des autres » . Un essai original sur une question centrale de la situation des femmes dans les sociétés contemporaines.
Théorie queer et littérature
Queer : écritures de la différence ? (vol. 1 : Autres Temps, autres lieux, vol . 2 : Représentations : artistes et créations), Pierre Zoberman (dir.), L’Harmattan, 284 p. et 170 p., 27 euros et 18 euros.
On sait qu’aux États-Unis gender ou queer studies sont souvent menées dans les départements d’anglais ou de littérature. Pierre Zoberman, lui-même professeur de littérature à l’université Paris-XIII, a choisi d’inaugurer une nouvelle collection chez L’Harmattan, intitulée « Identités, genres, sexualités », par deux ouvrages collectifs consacrés aux « écritures de la différence » au cours des siècles, dans les textes de l’Antiquité, au Moyen Âge ou à l’époque moderne, ainsi que dans les pratiques culturelles sous d’autres latitudes (Afrique, Maghreb, Mexique, etc.). Analysant ainsi les « pratiques discursives queer », les auteurs poursuivent dans le second volume leur exploration des représentations, cette fois dans l’art et chez les artistes, des identités gaies, lesbiennes ou bisexuelles. Jusqu’à « la contestation de toute identité dans et par l’œuvre »…
Brillant, ce travail est particulièrement novateur dans les contextes intellectuel et universitaire hexagonaux, encore trop souvent rétifs à la queer theory et aux pistes de recherches sur les identités sexuelles « dissidentes ».
Le genre du travail
Travail et genre. Regards croisés, France, Europe, Amérique latine, Margaret Maruani, Helena Hirata
et Maria Rosa Lombardi (dir.), La Découverte, 280 p., 24 euros.
En ces temps de crise économique et de chômage en hausse, une trentaine de sociologues et d’économistes européens et latino-américains ont choisi l’analyse comparative entre les marchés du travail français ou européens et ceux d’Amérique latine, en particulier du Brésil, pour y observer la place des femmes et des hommes, et mettre en perspective des réalités a priori fort éloignées. Ils montrent ainsi combien, en dépit des différences, la situation des femmes au travail se ressemble à des milliers de kilomètres de distance, notamment du point de vue des écarts de salaires, de retraites,
de carrières, de précarité et de conditions de travail. Des similitudes frappantes mises en lumière par ce travail rigoureux.
On lira aussi, sur la question du corps et de ses usages politiques, l’excellent volume de Claude Guillon, Je chante le corps critique. Les usages politiques du corps (H & O Éditions, 416 p., 23 euros).