Qui va payer la dette ?
Si elle n’est pas revue, l’actuelle fiscalité fera peser la charge du déficit sur les plus modestes.
dans l’hebdo N° 1045 Acheter ce numéro
le chiffre est inquiétant : pour 2009, le déficit budgétaire annoncé s’élèverait à 103,8 milliards d’euros, soit 5,6 % du produit intérieur brut. Et cette prévision du ministère des Finances n’intègre pas la prochaine baisse de la TVA dans la restauration, prévue pour 2010, qui creusera encore de quelques milliards le déficit de l’État. Selon les mêmes prévisions de Bercy, la dette de l’État français dépassera cette année 76 % du PIB (elle n’était « que » de 64 % en 2007 et de 67 % en 2008) et devrait continuer à croître en 2010 et en 2011.
Mais qui supportera la charge fiscale de la dette publique ? L’actuelle politique fiscale soutenue par Nicolas Sarkozy et le gouvernement a fortement mis en cause le principe d’égalité devant l’impôt, avec le maintien d’un bouclier fiscal profitant aux ménages les plus fortunés et de nombreuses niches fiscales. Ces dernières sont en hausse et, malgré un récent plafonnement, elles ont atteint un coût de 73 milliards d’euros en 2008 et représentent près de 27 % des recettes fiscales nettes de l’État.
Les effets du bouclier fiscal interrogent aussi : 834 contribuables, qui disposent d’un patrimoine de plus de 15,5 millions d’euros, ont bénéficié d’un remboursement évalué en moyenne à 368 261 euros. D’importantes « réformes » ont aussi substitué à la progressivité de l’impôt sur le revenu de nouveaux prélèvements proportionnels sur les revenus, telles la contribution sociale généralisée (CSG) et la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS).
L’impôt sur le revenu, base de la redistribution des richesses, est devenu un impôt minoritaire dans le paysage fiscal français. Il représente désormais moins de 20 % des recettes fiscales : sur 35 millions de foyers fiscaux, près de la moitié ont trop peu de revenus pour être imposables. À cela s’ajoute un effet peu souligné des plans de relance : l’endettement public profite aux détenteurs de cette dette, c’est-à-dire aux ménages les plus fortunés qui ont placé leur épargne sur les marchés financiers, notamment sous forme de bons du Trésor. Cette situation ne fait qu’empirer alors que les salariés paient la crise financière en subissant les plans sociaux et les suppressions d’emplois.
La montée de l’endettement de l’État est certes possible, mais à condition de financer le service de la dette en mettant en place une vaste réforme fiscale, incluant notamment les collectivités territoriales, pour éviter que les foyers fiscaux les plus riches n’échappent à l’impôt sur le revenu. Or, maintenue en l’état, l’actuelle fiscalité ne fait que déplacer la charge fiscale des foyers les plus cossus vers les revenus moyens et modestes.