« Nous ne sommes pas à vendre ! »
Pourrissement ou intensification ? Le mouvement étudiants-enseignants-chercheurs va décider ces jours-ci de son destin. Au cœur de la mobilisation, le refus de la loi Liberté et responsabilités des universités, votée en douce à l’été 2007. Cette loi, qui transforme l’université sur le modèle de l’entreprise, interpelle toute notre société.
dans l’hebdo N° 1050 Acheter ce numéro
Déjà profs ou chercheurs et encore étudiants, à 22, 23 ou 24 ans, ils sont à la croisée des chemins. Depuis quatre mois, Alice, Ariane, Grégoire et Mathias sont engagés corps et âme contre la machine de guerre que le gouvernement tente d’imposer aux universitaires. Nous leur avons demandé de prendre la plume pour présenter dans Politis leur analyse et expliquer les raisons de leur combat. Ce dossier est entièrement leur œuvre. Jusqu’aux illustrations, signées Jane, étudiante en philosophie à l’École normale supérieure de Paris (ENS), qui a donné formes (et quelles formes !) à cette Princesse de Clèves devenue symbole de la lutte. On se souvient que Nicolas Sarkozy, pas encore président, mais déjà bruyamment candidat, avait jugé scandaleux que ce grand roman du XVIIe siècle puisse figurer au programme d’un concours d’entrée dans la Fonction publique. À quoi bon, avait-il ironisé, quand on est guichetière ? Les femmes avaient particulièrement apprécié. Tout est là, dans cette mutilation de la personne humaine réduite à une fonctionnalité professionnelle. La guichetière « guichette ».
Toutes les réformes qui mobilisent aujourd’hui les étudiants, les enseignants et les chercheurs sont marquées par cette conception pusillanime. Évaluation de rendement et de rentabilité, faux critères d’efficacité, c’est la tyrannie du quantifiable. Il en va donc de l’idée que l’on se fait de notre société, de la place de la culture, du rôle des enseignants, de la vision que l’on inculquera aux générations futures. Autant dire que l’enjeu dépasse de beaucoup le sort particulier des étudiants et des enseignants aujourd’hui en lutte. L’analyse qui est ici proposée par Alice, jeune agrégée de lettres modernes, Ariane, élève certifiée de philo à l’ENS, Grégoire, agrégé, enseignant-chercheur en mathématiques, et Mathias, élève en lettres modernes à l’ENS, est aussi le fruit d’une réflexion collective mûrie au sein des assemblées générales. Derrière l’humour, et parfois une pointe d’autodérision, il y a chez nos journalistes d’un jour une réelle gravité. À la veille d’une rentrée où va se décider le destin de ce mouvement, nous leur donnons la parole.
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