Pétrole aux enchères…
Alors que les soldats américains quittent les villes, les champs pétroliers sont vendus aux trusts occidentaux.
dans l’hebdo N° 1059 Acheter ce numéro
La réalité est parfois plus caricaturale qu’un mauvais livre. Mardi, alors que les derniers soldats américains quittaient officiellement les villes irakiennes, après plus de six ans d’occupation, s’ouvrait à Bagdad la réunion d’attribution des champs pétroliers et gaziers. Au total, six champs de pétrole et deux champs gaziers dont l’exploitation sera confiée à des compagnies étrangères. Un gâteau de quelque 43 milliards de barils que doivent se partager 31 compagnies, dont, en premier lieu, les « majors » américaines et européennes. Le premier champ attribué sera celui de Roumaila, dans le sud du pays, dont les réserves sont estimées à 17,7 milliards de barils. Dès lundi, des dizaines de milliers d’Irakiens se sont pressés dans le parc Zawra de Bagdad pour fêter « la souveraineté » et « l’indépendance » retrouvées.
Une indépendance bien illusoire alors que la principale richesse du pays était mise aux enchères entre les grandes compagnies étrangères. Le matin même, l’armée américaine avait cédé les 86 positions qu’elle occupait dans les villes depuis 2003 pour être remplacée par 750 000 soldats et policiers irakiens. Elle a notamment évacué un bâtiment symbole, l’ancien ministère de la Défense, construit en 1938, qui lui servait de quartier général, après avoir été le haut lieu du pouvoir baasiste, sous la botte de Saddam Hussein.
Ce retrait s’inscrit dans l’accord signé en novembre dernier entre Bagdad et Washington. Il doit aboutir, fin 2011, au départ de toutes les troupes d’Irak. Problème : ce double transfert du pouvoir, militaire et économique, s’effectue alors que l’Irak est de nouveau le théâtre d’une série d’attentats attribués à Al-Qaïda qui ont fait plus de deux cents morts au cours des dernières semaines. La nébuleuse terroriste sert notamment de couverture à des attaques contre la communauté chiite, majoritaire dans le pays, menées par des extrémistes sunnites. Voire des anciens partisans de Saddam Hussein recyclés. Lundi, un camion transportant 64 obus de mortier a été intercepté dans l’ouest de Bagdad. On comprend dans ces conditions que le Premier ministre, Nouri al-Maliki, ait particulièrement insisté, mardi, sur la sécurisation des champs de pétrole…