Tinariwen à la fête
Les musiciens touaregs suscitent une fois
de plus l’enthousiasme avec un quatrième album empli d’une musique irrésistible.
dans l’hebdo N° 1069 Acheter ce numéro
L’histoire de Tinariwen débute dans les années 1980, mais son chapitre discographique seulement en 2002, avec un premier album qui lance une rumeur insistante à propos d’un groupe – il faudrait plutôt parler de collectif – de musiciens touaregs jouant de la guitare électrique. Une rumeur qui dépasse très vite le club des musiques du monde pour se propager parmi les fans de rock pas forcément habitués à aller chercher leur pitance sonore dans le Sud saharien. Les premiers concerts vont tout de suite confirmer les attentes avec ce tourbillon de rythmes et de sons, cette basse puissante qui a la force tranquille d’un gros animal aux mouvements puissants et langoureux, et ces guitares qui envoient des étincelles vers le ciel comme pour se mesurer aux étoiles.
Ce n’est pas un hasard si le public rock a adopté Tinariwen aussi rapidement et durablement. La caution Radiohead ou Robert Plant n’y est pas pour beaucoup ; les guitares électriques et les rythmiques hypnotiques sans doute un peu plus. Surtout, il est évident que Tinariwen vient combler un manque comme aucun des groupes apparus récemment ne pourrait même imaginer le faire. Sans même entonner les trompettes de l’authenticité, c’est peu dire que l’histoire qu’il raconte, tragique et passionnante, est très éloignée de ces derniers. Peut-être est-ce aussi la raison pour laquelle sa musique est si incroyablement vivante. Car c’est bien ce qui frappe d’emblée, que ce soit sur disque ou sur scène. Et ce qui fait que Tinariwen est devenu l’un des rares groupes dont on attend vraiment les disques et que l’on se réjouit d’aller voir en concert. Les sujets abordés dans les chansons ont beau être graves, un concert de Tinariwen est toujours une fête.
Imidiwan n’est donc que le quatrième disque du groupe. Son titre signifie « Compagnons », un mot un peu oublié chez nous, synonyme de lutte et de fraternité, autre mot lui aussi malmené par cette modernité que l’on nous vend (très cher) depuis un moment. Chez Tinariwen, il peut aussi bien désigner les compagnons de route qui ont fait partie du collectif à un moment ou un autre que l’ensemble de la communauté Touarègue. Et la musique semble une traduction sonore de cette idée de fraternité, notamment à travers les voix et ce dialogue permanent entre les solistes et les chœurs féminins, qui jouent comme jamais un rôle essentiel dans la plénitude de l’ensemble, cette musique magnifique, immédiate, chaleureuse, sensuelle et envoûtante.