De l’utilité du chaos

Israël a besoin d’ennemis qui sont chaque fois des « Hitler ». Ce fut Nasser en 1956, Saddam Hussein plus tard, Arafat à plusieurs reprises. C’est aujourd’hui Ahmadinejad. Les élites israéliennes font une fois de plus pression pour la guerre. Il faut comprendre que l’état de guerre n’est pas seulement pour elles une question de circonstance, c’est leur raison d’être au pouvoir. Si la paix s’établissait, si elle durait, on peut imaginer que ces élites seraient chassées du pouvoir. Il y a peu de pays réputés démocratiques dont les gouvernants sont des militaires. Il y a toujours dans les gouvernements israéliens une forte influence des généraux. Leur intérêt est de vivre en état de guerre ou dans la perspective d’une guerre. C’est à la fois leur justification en tant que militaires et une occasion politique par rapport à la question palestinienne. Car il faut bien comprendre que, pour Israël, la question n’est plus aujourd’hui une colonie de plus ou de moins en Cisjordanie.

Cela change certes beaucoup dans la vie des Palestiniens, mais cela ne résout pas fondamentalement le problème démographique auquel Israël va devoir faire face et qui ne résulte pas seulement de la croissance de la population palestinienne des Territoires, mais aussi de celle des Palestiniens d’Israël. Pour renverser cette évolution, il faudrait qu’Israël puisse pratiquer une nouvelle épuration, comme en 1948. Le monde occidental ne lui permettrait pas aujourd’hui de commettre cette épuration en temps de paix. Seule une situation de guerre, et le chaos qui en résulterait, pourrait permettre de provoquer un nouvel exode massif des populations palestiniennes, en particulier celles qui vivent en Israël. Consciemment ou inconsciemment, une partie de nos élites pense qu’une guerre avec l’Iran créerait ces conditions. Mais personne ne sait comment elle se finirait. Cela dit, je précise que je suis évidemment hostile à l’acquisition de la bombe atomique par l’Iran. Et je suis convaincu qu’Ahmadinejad est un élément déstabilisateur pour son pays et la région.