La cuisine de l’actu assaisonnée au sens critique
Ludique, pédagogique et politique, la chronique « Mon Œil » représente aussi une révolution formelle à la télévision.
dans l’hebdo N° 1084 Acheter ce numéro
Ça fonctionne comme un rétroviseur, dans lequel se bouscule une mosaïque d’images. Depuis sa création et son premier numéro, en septembre 2007, « Mon Œil » regarde en arrière. La chronique ne balaye pas l’actualité de la semaine écoulée, elle repasse les plats. Avec ses filtres, son tire-bouchon, ses mixers, son shaker. Toute une batterie de cuisine jubilatoire pour livrer une chronique de quelques minutes, gavée d’ingrédients tranchés, retranchés, additionnés. Des images puisées dans la réalité nue des rushs, les archives, le débit Internet, la publicité, les voix de la communication, le tout négocié dans une brinquebale mise en musique, portée par un texte, une voix off. Sujet, verbe, complément et sautes d’humeur, intonations, partis pris. Après, c’est affaire de montage, jusqu’à prendre des allures de fiction. Si le décryptage est un plat qui se mange froid, « Mon Œil », racontant une histoire à la première personne, avec son début et son épilogue, vire implacable. Elle rend aux images ce qu’elles ont de pouvoir, entre collages, allusions et symboles. Elle martyrise le robinet coulant à flots.
De quoi souligner tous les torts et travers des couleuvres qu’on ferait avaler au téléspectateur. Passent ainsi à la casserole les journaux télévisés, les talk-shows, les conférences de presse, les masses de reportages, d’une dépêche à l’autre. Ce qui fait l’actualité. Et l’information – qu’on veut bien donner.
Secondé par un assistant, un documentaliste en images, quatre monteurs, Michel Mompontet a l’expérience de l’image. La télévision est sa cuisine. Des années de politique étrangère, d’autres à « Envoyé spécial », confronté aux règles du magazine et du documentaire, puis le service culture de France 2. Et voilà maintenant plus de deux ans que la chronique enquille sur le journal de 13 heures du samedi, présenté par Laurent Delahousse. Avec un certain succès : l’audience s’est multipliée par deux depuis septembre 2007. Aujourd’hui, cette « case » du week-end rassemble entre 3,6 et 4 millions de téléspectateurs. Par les temps qui courent et galopent à perte, c’est rassurant.