Poser la question de tous les sectarismes
dans l’hebdo N° 1088 Acheter ce numéro
Le terme figure dans le rapport de la mission parlementaire sur le port du voile intégral : « Des dérives sectaires sont à combattre » (II, C). Preuve que certains arguments des experts opposés à une loi d’interdiction auditionnés par la mission ont été entendus, à défaut d’être mis en avant. Notamment l’intervention de l’anthropologue Dounia Bouzar, qui a relié le port du voile intégral à l’influence du discours salafiste, « totalitaire et sectaire [^2]» . Comment désamorcer cette influence ? D’abord, en ne considérant pas le niqab comme musulman, a-t-elle conseillé, au risque de « valider le prétexte religieux des groupuscules sectaires » et de les reconnaître comme des autorités religieuses et non comme des individus qui en instrumentalisent d’autres. Au risque, aussi, de faire à nouveau le procès de l’islam, les musulmans opposés au niqab pouvant être perçus comme des traîtres…
« La mission parlementaire aurait dû poser la question des sectarismes religieux dans leur ensemble » , regrette également l’islamologue Vincent Geisser dans Libération (27 janvier). En outre, fonder le débat sur la question du droit des femmes pourrait être vécu « comme une nouvelle façon de donner des leçons au monde musulman » , a prévenu Dounia Bouzar: « Il faut en finir avec le discours – qui date de la période coloniale – de celui qui sait à destination de celui qui doit évoluer. » « Dans le contexte français et occidental, c’est la dimension psychologique du retour du fait religieux qu’il faut prendre en compte » , a indiqué Tariq Ramadan, également auditionné par la mission, en rappelant que les femmes qui portent le voile intégral « tendent désormais à la disparition du physique en pensant qu’elles vont vivre le spirituel » . Or, « le psychologique ne se touche pas par la loi mais par l’éducatif, par l’accompagnement » , a souligné l’islamologue. C’est pourquoi Dounia Bouzar a souhaité voir le débat se déplacer sur le plan de la sécurité :
« Ainsi, tous les démocrates républicains, qu’ils soient de référence athée, agnostique, juive, chrétienne ou musulmane, pourront se donner la main dans ce combat typiquement français. »