Achille et la tortue

Après Takeshis’ (2005) et Glory to The Filmmaker (2007), Takeshi Kitano achève une trilogie sur la création avec Achille et la tortue. Le film raconte l’histoire d’un peintre, Machisu (interprété par Takeshi Kitano), de son enfance brisée par le suicide de son père, un riche collectionneur d’art, jusqu’à ses vieux jours de misère, où la peinture, toujours, continue de le hanter. Toute sa vie, Machisu n’aura eu de cesse de répondre à la demande d’un galeriste, jamais satisfait par ses productions, qui n’accrochera aucune de ses œuvres, sauf l’un de ses dessins d’enfance, dont personne ne connaît le véritable auteur. Achille et la tortue est un conte cruel d’une très grande force sur la folie créatrice qui consume un être, folie contagieuse qui gagne aussi sa femme. De plus en plus marginalisé, Machisu se livre à tous les stratagèmes pour pouvoir continuer à peindre, y compris les plus monstrueux, tel Bernard Palissy brûlant ses meubles pour percer le secret des émaux. Mais la postérité a gardé le nom de Bernard Palissy, tandis que Machisu restera dans l’anonymat sans jamais avoir vendu une seule de ses œuvres. Takeshi Kitano livre ici une réflexion toute en gravité sur la création qui ne trouve pas à qui s’adresser, même si le film est émaillé de gags qui résultent de l’imagination débridée de l’artiste. Le film avance comme son personnage, buté, obsédé, ensorcelé par les couleurs. Machisu ne sera jamais reconnu, mais il est porté par un absolu. En cela, sa vie est un destin.
Au moment où Achille et la tortue sort sur les écrans, Takeshi Kitano propose une exposition à la Fondation Cartier, à Paris, composée de peinture, de vidéo et d’objets insolites. L’occasion de constater, avec le sourire, ce qui le distingue et, peut-être, le rapproche de son personnage, Machisu.