RESF, Portrait d’un contre-pouvoir
dans l’hebdo N° 1092 Acheter ce numéro
Réseau éducation sans frontières. RESF : la réussite, c’est déjà ça, un sigle qui parle de lui-même. Quiconque fréquente une école ou suit l’actualité l’a déjà vu quelque part. Depuis 2004, RESF s’efforce, discrètement ou bruyamment, de soutenir dans leurs démarches de régularisation les jeunes majeurs sans papiers scolarisés et les familles sans papiers d’enfants scolarisés. Parce que l’impasse administrative dans laquelle se trouvent de nombreux migrants grève la vie collective. Tous les jours, le réseau alerte sur telle chaise vide dans une classe, telle arrestation, telle expulsion, tel rejet d’une demande d’asile ou d’un titre de séjour, telle urgence dans laquelle se trouvent des jeunes ou des parents qui ne sont pas « en règle ». Un travail de fourmi, et de titan, soutenu par 222 organisations. RESF part de l’école pour arriver à la préfecture. Il n’a ni chef ni porte-parole. De ce fait, il est difficile à cerner et difficile à contester. C’est un ensemble hétéroclite de plusieurs centaines à plusieurs milliers de personnes prêtes à se mobiliser partout et dans l’instant pour « refuser l’insoutenable » induit par les récentes lois sur l’immigration. De quoi inquiéter le « ministère de l’Expulsion » qui multiplie les tentatives d’intimidation.
RESF ne fonctionne comme aucune structure traditionnelle. Horizontal, souple, RESF, c’est chacun. Pas des « nouveaux militants », mais un nouvel endroit où agir, quand le besoin de résister s’impose. Le meilleur moyen de comprendre RESF, c’est de se référer à Internet : un espace commun d’échanges, des ramifications, des listes de diffusion, des personnes qui se connectent en permanence ou occasionnellement, mais dans le même but. Avec quelle efficacité ? Chaque régularisation est une victoire, chaque expulsion une défaite. Plus les textes se durcissent et plus le mouvement s’amplifie, assis sur des comités locaux qui poussent comme des champignons dès qu’une « affaire » surgit. RESF est la preuve que la société peut réagir quand elle est témoin, et victime, d’injustices. RESF est aussi la preuve que ces injustices se répètent malgré les mobilisations. À cheval entre des actions de terrain et une réflexion politique, RESF n’est pas seulement un nouveau lieu où s’engager, c’est peut-être aussi une nouvelle forme de contre-pouvoir.