Dernier combat

Annie Mercier joue un « Stabat mater » transposé dans les bas-fonds.

Gilles Costaz  • 1 avril 2010 abonné·es

Antonio Tarantino n’est pas un cinéaste américain mais un auteur de théâtre italien, encore peu connu et joué en France. Pourtant, ses mots claquent, ses sujets dérangent, ses fureurs explosent. Éric-Gaston Lorvoire met en scène son Stabat mater , qui détourne le thème de la Vierge-mère pleurant l’absence de son fils en le situant dans les bas-fonds les plus sordides. En scène, une femme seule entourée des images les plus saint-sulpiciennes : petit crucifix, christ à deux sous. C’est une ancienne prostituée à qui on a aussi volé son fils. Le jeune homme qu’elle a élevé serait aux mains de la police. Dans un langage bien peu religieux, le parler des putes et des charretiers, elle laisse éclater sa colère. Elle en veut à l’homme qui est le père de cet enfant, au milieu, au système, aux flics et aux truands qui ne se distinguent guère les uns des autres.

La force de ce spectacle coup-de-poing vient de l’œuvre elle-même, féroce et déchirante (on regrettera peut-être que la traductrice, Michèle Fabien, ait francisé les noms italiens), et de l’interprète exceptionnelle qu’est Annie Mercier. « Y a pas écrit conne sur mon front » , répète-t-elle. Et c’est tout le désarroi d’une femme réduite à l’impuissance qui surgit, tous ses ultimes et impossibles espoirs qui nous sautent au visage. Car le personnage livre un dernier combat, impitoyable et perdu d’avance. Annie Mercier est fascinante dans son mélange de puissance et de placidité. Quelle actrice !

Culture
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