Grosse colère à la crèche
Des salariées d’une halte-garderie privée ont été licenciées après avoir fait grève.
dans l’hebdo N° 1098 Acheter ce numéro
Licenciées. Après plusieurs semaines d’incertitude, la sanction est tombée pour trois des neuf employées de la crèche Giono, dans le XIIIe arrondissement de Paris. En novembre 2009, elles avaient créé avec trois autres salariées une section syndicale au sein de l’entreprise gestionnaire People and Baby, et venaient tout juste de faire grève pour revendiquer de meilleures conditions de travail. C’était le 1er mars. Le lendemain, les six salariées syndiquées se voyaient signifier leur mise à pied conservatoire.
Raisons invoquées par la direction de People and Baby : « un manquement aux règles d’hygiène et de sécurité » et « une insubordination permanente » . Pour les salariées, la Confédération nationale du travail (CNT) ainsi que les parents des enfants accueillis, il s’agit plutôt d’une « atteinte grave à la liberté syndicale » .
« J’ai clairement l’impression d’une grosse injustice » , explique Sophie Lhenry, membre du comité de soutien de parents aux salariées de People and Baby, mis en place à la fin du mois de mars pour soutenir les employées et demander leur réintégration.
« Lors de notre première réunion de section, on ne pensait pas en arriver là. On souhaitait juste faire respecter nos droits, confie Sophie Bournazel, l’une des salariées à l’origine du syndicat. Ce qui nous arrive aujourd’hui dans le privé, c’est le secteur public qui l’a permis. » Une allusion au fait que, anciennement municipale, la halte-garderie a été confiée en 2006 à People and Baby, à la tête de quelque soixante crèches et huit cents employés.
« Les salariées iront devant les tribunaux. Elles seront quand même virées, mais en ayant raison » , prédit Jean Aubel, de la CNT. Il estime qu’au-delà du « cas Giono », c’est le secteur dans son ensemble qui est aujourd’hui menacé. Une inquiétude qui est aussi celle du collectif Pas de bébés à la consigne !, qui a rassemblé près de 10 000 manifestants le 8 avril pour protester contre la politique mise en place dans le secteur de la petite enfance. Augmentation du nombre d’enfants accueillis, privatisation, abaissement du niveau de formation des professionnels encadrants, perte de réels projets pédagogique… Autant de mesures qui inquiètent professionnels et parents. « L’équipe a complètement changé du jour au lendemain, raconte Sophie Lhenry, la maman de Mathias, 21 mois, il y a des jours où je ne connais même pas les personnes à qui je laisse mon fils. »
Les salariées sont passées devant les prud’hommes. Le jugement ayant été remis en référé, elles devront attendre le 25 juin pour être fixées sur leur sort.