Milles colombes dans sa gueule
dans l’hebdo N° 1100 Acheter ce numéro
Troisième session, troisième anniversaire. Mais qu’on se souvienne d’abord. Ce soir du 6 mai 2007. Nicolas Sarkozy élu. Place de la Concorde, il annonce séance tenante qu’ « ensemble, nous allons écrire une nouvelle page de l’histoire de notre pays. Je ne vous trahirai pas » . Autour de lui se retrouvent ses chantres et ardents soutiens. Pur jus, première bourre, et tête de bois. Sur scène, se succèdent Jane Manson, entonnant « Faisons l’amour », Enrico Macias, « Ah, qu’elles sont jolies, les filles de Sarkozy », Gilbert Montagné, « On va danser ». Et, cerise sur le gâteau, surgissant de nulle part, extirpée d’Avignon, couverte de toiles d’araignée, Mireille Mathieu, chantant « Donnez-nous mille colombes ». À 23 h 17, de quoi créer des envies de résistance. Le Président, lui, revient tout juste des Champs-Élysées, d’un raout amical dans un chic palace, le Fouquet’s. Pour dire juste, selon l’expression de Christophe Alévêque, « Sarkozy au Fouquet’s, le soir de son élection, c’est : “Je vous emmerde !” Et c’est la seule promesse qu’il a tenue ! »
Depuis, l’atrabilaire comédien humoriste, lucide et vigilant, loin du bal des dupes, se fait fort de rappeler l’événement, chaque 6 mai au soir, aux portes d’un lieu devenu symbolique. C’est la fête à Zébulon Ier, « génie de Neuilly et prophète de l’économie ». Debout sur un tabouret, porte-voix à la main, Christophe Alévêque dresse en fanfare le bilan de la politique gouvernementale. En 2009, il avait cinglé l’argent coulant à flots en temps de crise, le FMI, les entreprises aux profits en hausse qui licencient. Avant de conclure son allocution tragicomique par un lâcher de parachutes dorés, de colombes en plastique, de liasses de faux billets de 500 euros, à l’effigie de Nicolas Sarkozy. L’année écoulée ayant été brillante et scabreuse, ce nouvel anniversaire s’annonce orgiaque. Avec un final dévolu au nouvel hymne de la droite décomplexée, les chères « Mille Colombes » de Mireille Mathieu.