Quand le quai d’Orsay abandonne la politique
En s’engageant exclusivement sur des projets économiques dans les Territoires palestiniens, la France consacre son renoncement au processus politique.
dans l’hebdo N° 1099 Acheter ce numéro
Sagement cantonnée au vide politique de son rôle de « bailleur de la paix », la diplomatie française s’aligne sur l’objectif du Premier ministre palestinien, Salam Fayyad, de créer un État palestinien indépendant avant 2011, avec ou sans pourparlers de paix avec Israël. Ainsi, pour la représentante de Nicolas Sarkozy, Valérie Hoffenberg, interrogée sur le projet de parc industriel franco-palestinien à Bethléem [^2], « la France a voulu participer au changement de politique de l’Europe qui consiste à davantage soutenir le secteur privé palestinien que la construction de l’État » .
Affirmant que « rien ne pourra se substituer à des accords de paix politiques » mais qu’il ne faut « pas attendre que ces accords arrivent » , elle assure que « les Palestiniens veulent du travail pour leurs enfants, faire du profit et améliorer leur vie quotidienne » . La France fait pourtant peu de cas des restrictions de circulation imposées par Israël aux Palestiniens et internationaux lambda, mais négocie activement pour lever les blocages sur les marchandises et favoriser l’obtention de visas pour les entrepreneurs. « Mettre au deuxième plan les questions de souveraineté et de droit à l’autodétermination transforme le peuple palestinien, en lutte politique pour ses droits nationaux, en groupe d’individus ayant seulement des besoins » , s’inquiète Julien Salingue.
« Que peut-on faire d’autre ? », interrogeait le chef de la diplomatie, Bernard Kouchner, interpellé le 24 mars dernier par Hervé de Charrette, lui-même ancien patron du Quai d’Orsay, sur la situation dans les territoires. Une façon décomplexée de contourner l’impasse politique et d’entériner son renoncement au processus politique, en l’absence de mécanisme de contrainte pour faire appliquer la légalité internationale.
[^2]: Entretien diffusé sur France 24 le 24 février 2010.