Une immense richesse musicale
dans l’hebdo N° 1105 Acheter ce numéro
Dès que Vasco de Gama aborde près du Cap, en 1497, il est accueilli en musique par des Khoikhoi. Les échanges ne cesseront
plus jamais, en dépit de l’esclavage et de la ségrégation.
Au Cap, d’abord, où des esclaves d’origines diverses (notamment orientales) apportent des répertoires qui se fondent avec ceux
des colons, cependant que les Khoikhoi s’approprient
des chansons hollandaises. Il en résultera un éventail d’airs à chanter et à danser qui nourriront de vivaces traditions
de fêtes du nouvel an.
Au cours du XIXe siècle, s’y ajoutent des influences britanniques et, surtout, américaines, et apparaissent des genres créoles
qui seront disséminés dans toute l’Afrique du Sud.
Sur le carreau des mines et dans les villes où se retrouvent
des personnes originaires de toutes les régions et des immigrés de bien des coins du monde, émerge au début du XXe siècle le marabi (cycle rapide d’accords euro-américains), d’où sortiront toutes les musiques populaires du XXe siècle. Le jazz, toujours très vivant, jamais coupé des musiques populaires, qu’incarnent aujourd’hui Zim Ngqawana ou Carlo Mombelli, tandis qu’Abdullah Ibrahim rappelle le temps de l’exil, quand – comme Chris McGregor et les Blue Notes, ou Miriam Makeba et Hugh Masekela – les musiciens créatifs devaient partir. Le mbaqanga , stérilisé par l’apartheid, réduit à l’état de vestige à consommation externe, que chantent encore les Mahotella Queens.
Les chœurs isicathamiya , tels les superbes Ladysmith Black Mambazo. Et même le gospel, dont la reine se nomme Rebeca Malope.
Le rock importé a connu un mouvement afrikaner anti-apartheid, le Voëlvry ,
et des mélanges originaux avec Johnny Clegg et Sipho Mchunu, dont sont sortis des groupes renouant avec le kwela et l’A frican Jazz , Mango Groove et, aujourd’hui, Freshlyground. Reggae (le regretté Lucky Dube) et rap (Prophets of the City, Black Noise) sont dynamiques et intègrent des éléments proprement sud-africains. Le kwaito , très populaire chez les jeunes Noirs, est moins original mais a produit une des plus grandes voix actuelles, Thandiswa Mazwai.
La musique « classique » demeure vivante. Des compositeurs comme Hans Roosenschoon, Kevin Volans et Michael Moerane
se sont efforcés de l’« africaniser », et l’université du Cap forme
de remarquables chanteurs d’opéra. L’action culturelle n’est pas une priorité du gouvernement sud-africain. Pourtant, les talents
ne cessent d’apparaître, les universités mais aussi des établissements privés tentent de leur donner, sans aucune exclusive stylistique, les moyens de s’épanouir et, dans les églises, les petits clubs, les foyers de travailleurs, voire les rues,
ils essayent de se faire reconnaître. La diversité qu’incarnent
ceux qui viennent jusqu’à nous n’est encore qu’un reflet partiel
de la richesse des musiques vivantes d’Afrique du Sud.