Quoi de neuf, prof ?

La rentrée 2010 est le point de convergence de plusieurs réformes par degré et par discipline engendrant de nombreuses polémiques. Voici les plus emblématiques.

Ingrid Merckx  • 26 août 2010 abonné·es

Premier degré

La scolarisation des moins de 3 ans est en baisse : 18 % en 2009 contre 35 % en 2003, rappelle le Snuipp, pour qui la petite section sert de « variable d’ajustement comptable », « alors que toutes les études montrent que scolariser le plus longtemps possible est le meilleur moyen d’assurer la réussite de tous. » Le décret Morano paru le 8 juin augmente les effectifs dans les structures d’accueil de la petite enfance et institue des jardins d’éveil (payants). L’école reste le seul dispositif d’accueil et d’apprentissage gratuit et ouvert à tous.
Parmi les conseils de rentrée du ministère : « Garantir l’application pleine et entière des programmes… » Les programmes de 2008 sont pourtant contestés : « inadaptation des contenus », « affaiblissement de leur dimension culturelle » et « conception mécaniste des apprentissages », fustigent des enseignants réunis au sein de l’Appel des 19 [^2]. Du coup, certains fonctionnent encore avec les programmes de 2002, dont l’ambition était « de doter tous les élèves des outils nécessaires pour réussir au collège ».

Collège

Mise en place de l’application nationale du livret personnel de compétences, qui valide les acquis du socle commun après un premier bilan en fin de CE1 et un deuxième en fin de CM2. Le ministère entend ainsi « parachever la mise en œuvre du socle commun » et également installer le « diplôme national du brevet » (DNB).

Lycée

Mise en œuvre de la réforme du lycée, qui cale le parcours de l’élève non plus sur le bac mais sur la licence. « Préprofilage universitaire » , lance Roland Hubert, du Snes. 2010 est la première année de la « nouvelle seconde », 2011 sera celle de la « nouvelle première générale », dont les programmes viennent d’être publiés, et 2012 de la « nouvelle terminale générale ».

Enseignements d’exploration

Proposés en seconde dès la rentrée, les enseignements d’exploration se substituent à ceux de détermination pour « faire découvrir de nouveaux domaines et aider à l’orientation » , selon le ministère. Les élèves doivent choisir entre deux enseignements d’une heure et demie, dont un obligatoirement en ­économie. Le deuxième pouvant être : sciences économiques et sociales, création et activités artistiques, création et innovation technologiques, santé et social, biotechnologies, science et laboratoire, littérature et société, sciences de l’ingénieur, méthodes et pratiques scientifiques, langues et cultures de l’Antiquité (latin, grec), troisième langue vivante. « Pas forcément idiot, commente Roland Hubert, sauf que cela privilégie le choix professionnel par rapport à l’apprentissage et ­engendre de nouvelles disparités entre élèves et entre établissements. »

Histoire-géographie

Le nouveau programme d’histoire-géo de première générale est conditionné par la réforme du lycée, qui fait terminer le tronc commun en première et rend ces deux matières optionnelles en terminale S (50 % des élèves). Conséquences : un programme condensé en histoire, avec des « pans entiers d’une histoire socialement utile » qui disparaissent, selon le Snes. Soit « la présentation des idéologies nées au XIXe siècle (notamment socialismes, libéralisme), le mouvement ouvrier, la lutte de 1848 à 1880 autour de la forme républicaine de l’État et la définition de la République (incluant la Commune en L/ES) sans compter l’histoire politique et sociale de la France de 1962 à nos jours. Le régime de Vichy n’apparaît plus qu’au travers de la lutte de la Résistance ! » En géographie, « on reste sur un programme parfois amélioré sur l’Europe et la France, mais où toute l’échelle mondiale, avec l’étude de l’Asie et des États-Unis dans le cadre de la mondialisation, disparaît du tronc commun ».

Mathématiques

Les maths ne sont plus obligatoires en série L. Pour certains élèves, l’apprentissage de cette matière s’arrête donc en seconde.

Philosophie

Le 6 juillet, l’Acireph (Association pour la création d’instituts de recherche sur l’enseignement de la philosophie) a relancé le débat sur la refonte des programmes de philo, notamment dans les filières technologiques. Elle critique, entre autres, l’écart entre l’enseignement, fondé sur des notions, et l’examen, qui soumet une problématique.

Éducation physique et sportive

Plus d’EPS obligatoire au concours de professeur des écoles. C’est l’une des conséquences de la masterisation. Les étudiants qui ne prennent pas option EPS en master voient leurs horaires dans cette matière passer de 72 h à 14 h à La Réunion, de 66 h à 20 h à Grenoble, de 84 h à 30 h à Lyon. « À Versailles et à Besançon, les étudiants pourront suivre leur master sans avoir bénéficié d’une seule heure d’EPS ! » , s’indigne le Syndicat national de l’éducation physique de l’enseignement public. « Pas d’épreuve au concours signifie pas de formation, ou un horaire minimum ! », rappelle le syndicat. «  Comment améliorer l’enseignement de l’EPS dans ces conditions ? Un professeur des écoles doit pourtant enseigner trois heures de sport par semaine. »

Sciences économiques

Luc Chatel a décidé de faire passer en force la réforme des programmes de sciences économiques et sociales, prévue pour la rentrée 2011 pour les classes de première, et en 2012 pour la nouvelle terminale. Dès la mi-juillet, les services du ministère ont confirmé que les nouveaux textes devaient être publiés dès la rentrée. Le contenu, très idéologique, est pourtant contesté. SUD Éducation dénonce un programme « de nature encyclopédique » ainsi que « le dogme du découpage économie-sociologie, qui interdit d’étudier un ­certain ­nombre d’objets sous ce double angle, et l’aspect des questionnements, qui ne permettent pas à des lycéens de comprendre le fonctionnement de la société ».
« L’équilibre entre les disciplines est bouleversé, au détriment manifeste de la sociologie » , estiment également l’Association française de sociologie et l’Association des sociologues enseignants du supérieur.

[^2]: 19 organisations syndicales et associatives ont lancé une pétition en mars 2008 pour demander le retrait du projet Darcos sur les programmes de primaire.

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