À l’écoute du mouvement social ?

Le PS participera aux manifestations pour les libertés, l’Éducation nationale et les retraites, avec 2012 pour objectif.

Michel Soudais  • 2 septembre 2010 abonné·es

Est-ce l’amorce d’un tournant historique ? En 2012, a professé Martine Aubry à La Rochelle, le Parti socialiste ne veut « pas seulement une victoire par défaut parce que le pays ne voudrait plus du sarkozysme » . Son ambition, a-t-elle expliqué en substance, est d’être « le parti d’un nouvel espoir et d’un nouveau départ » , assez attractif pour permettre, cette fois, aux Français qui se plaignent d’avoir « souvent voté contre quelqu’un ou quelque chose » de « voter pour ». Dans un parti dont un grand nombre d’élus ne détiennent leur fonction qu’au bénéfice du « vote utile », le propos est suffisamment inouï, surtout dans la bouche de la Première secrétaire, pour ne pas être relevé. « Pour nous, assure encore Mme Aubry, la politique consiste à régler les problèmes des gens, et non à régler des comptes avec le camp adverse. Nous ne voulons pas le pouvoir pour le pouvoir, mais le pouvoir pour porter l’espoir. »

Cet espoir peut-il être celui des manifestants qui s’apprêtent à battre le pavé le 4 septembre pour défendre les libertés menacées par la xénophobie, le 6 septembre contre les attaques multiples portées au système éducatif, le 7 septembre contre la prétendue « réforme des retraites » ? Le PS le pense ; il soutient le mouvement dans l’Éducation nationale et appelle ses adhérents à participer aux manifestations unitaires du 4 et du 7, à propos desquelles Emmanuel Maurel, secrétaire national à l’université permanente et aux universités d’été, membre du courant de Benoît Hamon, a rappelé dimanche qu’elles touchent à « deux piliers de l’identité socialiste, la promotion de la démocratie et la redistribution des richesses ».
Les ateliers et séances plénières ont permis de se faire une idée de l’état d’avancement de la réflexion du PS sur ces trois sujets, qui mobiliseront la rue cette semaine. Tour d’horizon.

La sécurité.

Martine Aubry, qui s’était contentée d’un communiqué début août, a frappé fort dès son arrivée, jeudi, dénonçant « un été de honte pour la France » , précisant que son propos ne visait pas seulement le discours de Nicolas Sarkozy à Grenoble, mais aussi tout ce qui se passe autour des Roms. La condamnation morale, complétée par un nouvel angle d’attaque, politique : les mesures prises depuis huit ans par Nicolas Sarkozy en matière de sécurité, comme ministre de l’Intérieur puis président de la République, sont non seulement dangereuses pour les libertés mais inefficaces. « Pour avoir des résultats, il faut une autre politique » , a lancé Martine Aubry, citant les bonnes pratiques des maires socialistes de Toulouse, d’Aulnay-sous-Bois, d’Aubervilliers, de Lille, de Bondy et de Créteil.
Les solutions qu’elle a évoquées – programme départemental de prévention de la délinquance juvénile, police de quartier, moyens humains et technologiques, loi pour mieux contrôler les ventes d’armes, travaux éducatifs d’intérêt général, mesures d’éloignement ou de placement dans des centres d’éducation ouverts ou fermés – ne sont que des pistes. Qui, comme le « pacte de national de sécurité publique », seront détaillées lors d’un forum, le 2 octobre, promet Mme Aubry, qui admet qu’« aucune réponse n’est miraculeuse ».
La préparation de ce forum a été confiée à deux élus aux approches éloignées. Le député du Finistère, Jean-Jacques Urvoas, secrétaire national en charge du dossier, très critique sur la « vidéosurveillance », terme qu’il utilise par refus de reprendre les mots de la droite, considère que « la première des libertés, c’est la liberté » . Le sénateur maire de Dijon, François Rebsamen, lui, ne souhaitait pas que le PS participe à la manifestation du 4 septembre par crainte de « débordements gauchistes ». Le PS « n’est pas la Ligue des droits de l’homme », déclare ce partisan de « la vidéoprotection », pour qui les maires, principaux participants à ce forum, « sont les premiers soldats de la sécurité publique », favorables à « la sanction et à l’ordre juste ».

L’éducation.

L’éducation sera en 2012 « la première des priorités » des socialistes, a affirmé Martine Aubry. Mais en l’attente de la convention sur l’égalité réelle, le 11 décembre, difficile d’imaginer à quoi ressemblera le « grand projet éducatif global » évoqué dans son discours, ou la « vraie formation à la pédagogie » dont elle a annoncé la création. Auparavant, Bruno Julliard, secrétaire national en charge du dossier, avait appelé sans beaucoup plus de précisions à opérer des « transformations qui nécessitent des ruptures majeures » pour tenter de corriger « un système éducatif qui organise à tous les étages la reproduction sociale ». Mais, a-t-il prévenu, dans « un contexte économique difficile, les moyens seront limités » , ce qui le conduit à accorder une grande importance à la « restauration d’un climat de confiance » Un travail qui commence aujourd’hui : « Notre responsabilité est d’être aux côtés des enseignants et des parents d’élèves qui se battent, mais aussi d’expliquer la logique du démantèlement de l’institution. »

Les retraites.

La patronne du PS a prévenu que les socialistes « seront tous sur le pont pour la manifestation le 7 septembre » sur les retraites. Et notamment pour « montrer qu’un autre modèle est possible » , et que le PS a des propositions à faire. Car, sur ce dossier, il a déjà arrêté sa position avant l’été. Assez bien connue désormais, elle a été rappelée par la députée Marisol Touraine en présence de représentants de la CGT, de la CFDT, de FO et de l’Unsa. Si tout le monde s’accorde sur la dénonciation du projet gouvernemental et la défense de la retraite à 60 ans, l’approche socialiste, bien qu’elle comprenne une mise à contribution des revenus financiers et des banques pour compenser le manque à gagner consécutif à la crise, n’est pas celle de la CGT. « Pour ceux qui ont commencé à travailler jeunes, c’est la meilleure protection » , a déclaré la députée socialiste, qui a demandé d’admettre que « collectivement il faudra travailler plus longtemps » , ce qui lui a valu quelques huées. « En même temps, il ne faudra pas l’imposer » , a-t-elle ajouté. Quand le PS estime qu’«  une question démographique se pose, mais dans la durée, et que c’est donc dans la durée qu’il faudra la résoudre », Éric Aubin a rappelé que pour la CGT le problème n’était « pas démographique ». Une divergence qui, en cas de durcissement du mouvement, ne favorisera pas les « vote pour ».

Politique
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