La chasse au lopin est ouverte
De plus en plus de personnes cultivent leur jardin ou rêvent d’en avoir un. Pour le plaisir, mais souvent aussi par nécessité, car les potagers permettent à nombre de familles de faire face à la crise.
dans l’hebdo N° 1116 Acheter ce numéro
Le jardinage, il y a dix ans, ne faisait guère l’ordinaire des médias. Aujourd’hui, aucun journal ni radio ne peut se passer de son jardinier et de sa chronique florale ou potagère, les revues spécialisées engrangent les abonnés, et les éditeurs spécialisés accumulent les ventes. Les jardiniers médiatiques deviennent de nouveaux gourous que l’on consulte comme des oracles. Tout le monde parle jardin, mais le phénomène de mode est dépassé. Le jardinage est d’autant plus devenu sujet de société qu’à côté du jardin plaisir, du jardin écologie, s’impose le jardin nécessité, qui permet à bien de gens de faire face à la crise grâce à leur potager. Les listes d’attente pour la location d’un lopin de terre s’allongent dans toutes les régions. Et dans les jardins familiaux de nouvelles convivialités s’inventent, fondées sur une nécessité partagée. C’est aussi une forme de réaction envers les grandes surfaces, auxquelles tous ces retraités, cadres, ouvriers ou chômeurs ont la certitude de faire un pied de nez.
La multiplication des jardins communautaires et partagés illustre, au-delà de l’engouement initial, une forme d’autonomie qui produit ses effets : les spécialistes estiment à 100 000 tonnes les quantités de tomates provenant de la production non-marchande. Tandis que les uns et les autres s’échangent des plants et des semences sans passer par les jardineries et que des centaines de rencontres s’organisent chaque année en France. Seules, jusqu’à présent, les deux guerres mondiales avaient transformé le jardinage en préoccupation nationale. Mais il est vrai que la crise économique déclenchée par les banques ressemble beaucoup à une guerre. Et qu’elle incite un nombre grandissant de citoyens à entrer dans une résistance destinée à défier un système, et dont les jardiniers célèbres sont les bergers.