Retraites : il est possible de gagner
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Le recul de l’âge légal de la retraite de 60 à 62 ans et celui de l’âge de départ à taux plein sans décote de 65 à 67 ans, ainsi que l’allongement de la durée de cotisation à 41 ans en 2012 et à 41,5 ans en 2020, produiront au moins six effets :
– la baisse des pensions de tous les futurs retraités, car ils seront très rares ceux qui auront pu satisfaire à l’exigence de cotiser plus longtemps, à cause du chômage élevé et de l’éviction par les entreprises des salariés avant 60 ans pour deux tiers d’entre eux ;
– les femmes, déjà victimes de fortes inégalités en termes d’emplois et de salaires, verront leur situation se détériorer davantage en raison de leur précarité et de leur vie professionnelle discontinue ;
– les jeunes, entrant dans la vie active de plus en plus tard, ne pourront jamais avant 70 ans avoir une carrière leur permettant d’accéder à une retraite décente ;
– les salariés ayant commencé à travailler avant 18 ans pourront partir plus tôt, à condition d’avoir la durée de cotisation requise… plus deux ans ;
– les travailleurs ayant effectué des travaux pénibles ou ayant été exposés à des dangers devront prouver qu’ils sont frappés d’un handicap d’au moins 20 % ;
– l’affaiblissement du système par répartition ouvre la voie à la capitalisation avec les mesures en faveur de l’épargne salariale.
Véritable purge sociale, l’austérité pour les pauvres doit compenser les largesses pour les riches et l’impunité pour les fauteurs de crise. Pourtant, travailler moins – et non pas plus – est parfaitement possible dès lors que les gains de productivité sont équitablement partagés dans la société. Maintenir la retraite à 60 ans symbolise un droit humain fondamental : celui de pouvoir jouir en bonne santé des meilleures années qui restent à vivre tout en se livrant à des activités hors de toute subordination.
La condition de l’équilibre financier des régimes de retraites est l’augmentation progressive des prélèvements sociaux pour accompagner l’évolution des besoins. Les cotisations patronales sont bloquées depuis de nombreuses années, pendant que les dividendes distribués aux actionnaires se sont envolés dans une proportion égale à la baisse de la part salariale dans la valeur ajoutée. Nous proposons donc de soumettre à cotisations l’ensemble des dividendes et des revenus de la propriété.
Le débat ainsi posé permettrait d’inscrire une réforme des retraites dans un renouvellement complet des politiques économiques et sociales, qui la solidifierait dans le temps :
– une dynamique favorable à l’emploi pour des travaux utiles à la population ;
– une répartition des revenus primaires qui rende possible un arbitrage démocratique entre réponse aux besoins sociaux aujourd’hui non satisfaits, investissements préparant un avenir écologique et réduction du temps de travail ;
– une réforme profonde de la fiscalité afin que cessent les inégalités de plus en plus insoutenables.
Les enjeux des retraites sont tels qu’ils concernent le choix d’une société : ou bien l’approfondissement des inégalités et le délitement du tissu social par la désaffiliation progressive des individus à la collectivité, ou bien le renforcement des solidarités actuelles et futures.
Aussi, les signataires de ce texte, membres de l’appel national Attac-Copernic « Faire entendre les exigences citoyennes sur les retraites », renouvellent-ils :
– leur engagement total, au côté des organisations syndicales, pour obtenir le retrait de la réforme, par de nombreuses initiatives et manifestations propres, allant du local au national : « lundis au soleil », réunions publiques, pétitions, saisine de la Halde pour discriminations envers les femmes, etc. ;
– leur détermination à porter jusqu’au moindre coin de France le débat dans toutes ses dimensions, de telle sorte que le peuple s’en empare, comme il a su toujours le faire lorsque des intérêts vitaux étaient menacés ; dans le cas présent, la société doit pouvoir se prononcer clairement.