Le bon choix des Nobel
On ne peut qu’applaudir la remise du prix Nobel de la paix à Liu Xiaobo, et le combat pour la libération de ce professeur dissident doit se poursuivre.
dans l’hebdo N° 1122 Acheter ce numéro
Le combat pour les Droits de l’homme face à des régimes autoritaires est rarement dépourvu d’ambivalence. Il arrive souvent que la démocratie soit le fourrier du libéralisme économique, voire du nationalisme. Il arrive aussi que les héros d’un jour se révèlent, une fois libres, de fieffés oppresseurs. Walesa n’a été, quand il a accédé au pouvoir en Pologne, ni un exemple de démocratie ni un modèle de progressisme. Et on ne parlera pas ici de Nathan Chtcharanski, pour lequel nous nous sommes battus pour qu’il échappe à ses geôliers staliniens, avant qu’il ne devienne le plus raciste des ministres israéliens face à la question palestinienne. Nul ne sait ce que deviendrait Liu Xiaobo, le dissident chinois distingué par les jurés du Nobel, s’il avait un jour une parcelle de pouvoir.
Mais le combat pour la libération de ce professeur de 54 ans et de ses amis, auteurs de la « Charte 08 », ne tolère ni les restrictions mentales ni les regrets. Il faut donc applaudir le choix des Nobel. D’autant plus que Liu Xiaobo n’a pas manqué de se rattacher au grand mouvement de protestation de la place Tianamen, en juin 1989, et de se réclamer de l’héritage de ceux qui ont perdu la vie en faisant face aux chars de Yang Shangkun et de Deng Xiaoping. L’évocation de ce dernier nom est là pour rappeler que la Chine autoritaire n’a pas attendu pour cultiver l’ambiguïté de l’exploitation du thème des droits de l’homme.
C’est Deng qui a poussé le plus loin cette association entre un libéralisme sauvage et une dictature politique. Cette page (voir ci-dessus l’analyse de Dominique Plihon) illustre bien la complexité du problème. C’est cette Chine ardemment impliquée dans la mondialisation financière qui continue d’emprisonner ses opposants politiques. Le combat pour la libération de Liu Xiaobo est totalement le nôtre.