Le Goncourt pour Houellebecq
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Voilà un prix qu’on ne peut qualifier de surprise, tant il avait été annoncé depuis des mois, avant même la parution de la Carte et le territoire (Flammarion), le roman qui vaut à Michel Houellebecq le prix Goncourt.
On ne cesse de répéter, dans les médias, que la récompense vient après trois tentatives ratées, avec les Particules élémentaires (1998), Plateforme (2001), et la Possibilité d’une île (2005). C’est étonnant comme cet auteur « rebelle », cet « inrockuptible » de la littérature (le magazine culturel est depuis longtemps l’un de ses plus fidèles soutiens), accorde autant d’importance à un prix aussi académique. Mais peut-être le besoin de reconnaissance est-il sans limite, même pour le plus lucide des hommes (la lucidité extrême induisant chez Houellebecq, on le sait, une misanthropie aiguë).
D’où un travail sur l’image du bonhomme, celui-ci ayant limé ses canines d’auteur provocateur, et déclamant à qui voulait l’entendre qu’il désirait maintenant être aimé. Une pitié.
Il n’en reste pas moins que les jurés Goncourt ont couronné, ce 8 novembre, un roman qui témoigne d’une grande persévérance, là aussi, dans la pauvreté littéraire (cf. notre critique parue dans le numéro du 9 septembre). Mais également un livre qui se situait déjà dans les meilleures ventes. Le prix ne viendra qu’amplifier le succès commercial de la Carte et le territoire .
Or, cet aspect des choses, plus prosaïque, a été très souligné avant la remise des prix, l’édition et la librairie traversant une crise sérieuse. Comme le résumait le magazine de la profession Livres hebdo dans son édition du 5 novembre : « De la qualité du palmarès 2010 dépend dans une mesure non négligeable le prolongement jusqu’à Noël du redressement du marché. » Voilà qui est clair (mais pas vraiment nouveau) : foin de la littérature, vive les livres qui alimentent le tiroir-caisse ! Vive Houellebecq !
Quant au prix Renaudot, il a été attribué au désolant Apocalypse bébé , de Virginie Despentes (Grasset). Voilà deux livres qui font la paire, et deux auteurs que d’aucuns, dans les médias, qualifient de « trash » désormais institutionnalisés, domestiqués, ingérés par le milieu des gens-de-lettres. Paix à leur âme.
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