Prêt pour la bataille électorale

Au congrès du Mans, la « formation d’un homme » s’est dotée de deux coprésidents, Jean-Luc Mélenchon et Martine Billard. Elle veut ouvrir le Front de gauche à la Fase et au M’Pep.

Michel Soudais  • 25 novembre 2010 abonné·es

C’est les yeux rivés vers 2012 que le Parti de gauche a tenu son deuxième congrès, le week-end dernier, au Mans (Sarthe). Un congrès marqué par une volonté d’ouverture symbolisée par les prises de parole de dix-huit représentants d’associations, de syndicats et de partis politiques, venus faire part de leurs préoccupations, analyses et propositions, et dont les interventions ont ponctué les débats. Sans oublier la présence d’une trentaine de délégations internationales, représentant vingt pays sur quatre continents, qui, dans une déclaration commune, ont appelé à la tenue d’un Forum mondial de l’autre gauche. Un congrès marqué aussi par l’affirmation renouvelée que le Front de gauche est « le » moyen de construire un débouché politique offrant des réponses d’une radicalité concrète face aux désastres sociaux et écologiques causés par le capitalisme ; et la proposition d’ouvrir ce Front à des adhésions directes et à tous les alliés des régionales, NPA compris.

Symboliquement, la Fédération pour une alternative sociale et écologique (Fase), représentée par Clémentine Autain, avait été invitée à participer au meeting final, dimanche. Intervenant entre Christian Picquet, porte-parole de la Gauche unitaire, et Pierre Laurent, numéro un du PCF, l’ex-conseillère de Paris a enflammé la salle en apportant son soutien à une candidature présidentielle de Jean-Luc Mélenchon, malgré des divergences rappelées sur « la République et la laïcité, la forme parti et la révolution par les urnes »  : « Il en a la volonté et la capacité. Je n’aurai pas d’états d’âme, et même de l’enthousiasme, à faire sa campagne ! » Abordant les relations de la Fase avec le Front de gauche, la jeune femme a pris bonne note du « Oui » massif de la salle à la question de savoir si ce dernier est prêt à s’élargir. Une demande appuyée par Jean-Luc Mélenchon, qui y a joint celle du Mouvement politique d’éducation populaire (M’Pep).

Le secrétaire national du Parti communiste a en revanche prudemment botté en touche : « La question clé de l’élargissement du Front de gauche est celle de l’élargissement populaire. » Plutôt qu’aux mouvements politiques, c’est « aux acteurs du mouvement social » qu’il s’adresse, les invitant à ne pas se laisser « confisquer la gauche » et à mettre autant d’énergie à « s’impliquer dans la question politique [qu’ils en mettent] dans la question sociale » . N’était cette défiance, Pierre Laurent s’est voulu rassurant sur l’engagement du PCF : « Tout dans la situation actuelle nous invite à poursuivre ensemble, tous ensemble, le chemin entrepris, quels que soient les débats qui nous animent. […] Nous nous mettrons donc d’accord sur une candidature commune pour la présidentielle, car nous en avons besoin. »
Christian Picquet avait de son côté indiqué que ce candidat devrait être choisi « en fonction de sa capacité à incarner un esprit collectif » .

En clôture, Jean-Luc Mélenchon s’est appliqué à parler au nom du Front de gauche, se plaçant en confrontation directe avec Nicolas Sarkozy, il a demandé le départ des troupes français d’Afghanistan, dénoncé le « précariat » , plaidé pour la nationalisation de « l’eau et de l’énergie » , le « partage des richesses » , et demandé à nouveau avec force un référendum sur les retraites en invitant à signer massivement l’appel en ce sens initié par Politis. Le député européen, qui souhaite un débat avec eux, a aussi mis en garde ses anciens camarades du PS : le Front de gauche n’est pas un « supplétif de circonstance » et ne participera « à aucune coalition contre-nature » . Avant de dénoncer les « alliances totalement inacceptables des écolos et des socialistes contre des sortants » du PC et du PG aux cantonales, qu’il souhaite « politiser » .

Auparavant, les 700 délégués du Parti de gauche s’étaient dotés d’une nouvelle direction, avec un bureau national de 60 membres, paritaire, rajeuni et renouvelé pour près de la moitié – Claude Debons et Jacques Rigaudiat, critiques sur le positionnement de Mélenchon, ne se représentaient pas. Le premier acte de cette instance a été d’élire deux coprésidents, Jean-Luc Mélenchon et Martine Billard. La députée de Paris, qui avait rejoint le PG il y a un an après avoir quitté les Verts, en était jusqu’ici la porte-parole. Ce binôme aura notamment pour tâche de déjouer l’image renvoyée par les médias d’ « un parti personnalisé » . Une image réductrice à en juger par les votes sur les trois documents en discussion. À chaque fois, les options alternatives en débat ont recueilli un nombre non négligeable de voix, que ce soit sur la motion d’orientation, sur un texte définissant le parti que veulent les militants du PG ou ses statuts. Jean-Luc Mélenchon n’a d’ailleurs pas pu empêcher les délégués d’imposer un non-cumul strict des mandats, qu’il juge irréaliste dans un parti qui compte encore peu d’élus.

Les congressistes ont aussi approuvé un rapport d’activité qui rendait compte du chemin parcouru par leur formation depuis sa création en novembre 2008. Ce texte revendique 8 200 militants, dont 40 % de femmes et 32 % de moins de 40 ans, répartis en 290 comités, inégalement présents dans 97 départements et parmi les Français de l’étranger. Une base encore fragile mais déterminée à « faire de chaque moment une préparation politique de 2012 ».

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